Rapport de la MANUA : les Taliban intensifient la répression des libertés fondamentales et des droits de la femme
Rapport de la MANUA : les talibans intensifient la répression des libertés fondamentales et des droits des femmes
04/05/2025
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La Section des droits de l’homme de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA) a publié un nouveau rapport examinant la situation des droits de l’homme en Afghanistan de janvier à mars 2025. S’appuyant sur des observations sur le terrain, le rapport révèle que les talibans ont continué d’imposer d’importantes restrictions à la liberté de mouvement des femmes sans tuteur masculin (mahram). Selon les conclusions de la MANUA, ces restrictions incluent l’interdiction pour les femmes d’accéder aux services de santé, aux magasins, aux marchés, aux bureaux gouvernementaux et à d’autres lieux publics. Ces incidents ont été recensés dans les provinces de Ghazni, Herat, Badakhshan, Kandahar et Farah. De plus, les talibans auraient contraint plus de 50 hommes appartenant à la secte ismaélienne du Badakhshan à se convertir à leur religion. Ceux qui ont refusé ont été sévèrement torturés et battus.
Le rapport, intitulé « Situation des droits de l’homme en Afghanistan » , a été publié par la MANUA la semaine dernière, analysant la situation des droits de l’homme entre janvier et mars 2025. Il met en évidence les restrictions continues imposées par les talibans aux citoyens, en particulier aux femmes et aux filles, les conversions religieuses forcées, les victimes civiles d’attaques armées et les cas de torture, d’exécutions extrajudiciaires et de détentions arbitraires d’anciens membres des forces de sécurité.
Maintien de l’interdiction de l’éducation des filles
La MANUA rapporte que la nouvelle année scolaire a commencé – pour la quatrième année consécutive – sans la présence des filles au-delà de la sixième année. Les talibans n’ont encore publié aucune déclaration ni directive indiquant la réouverture des écoles et des universités aux filles.
Liberté de mouvement
Selon le rapport, la MANUA a reçu des informations selon lesquelles la police des mœurs des talibans a émis des directives verbales aux cliniques de santé, aux magasins, aux marchés, aux bureaux gouvernementaux et aux chauffeurs de taxi, leur ordonnant de ne pas fournir de services aux femmes non accompagnées d’un mahram et de leur refuser l’accès aux installations publiques.
Dans la province de Ghazni, la police des mœurs talibane aurait ordonné que les femmes et les filles sans tuteur masculin et ne portant pas le hijab prescrit se voient refuser l’accès aux bureaux gouvernementaux et aux services publics. Parmi les autres cas recensés figurent l’interdiction faite aux femmes sans mahram d’entrer dans le barrage de Pashdan à Hérat, l’interdiction faite aux femmes d’accéder au marché transfrontalier entre l’Afghanistan et le Tadjikistan dans le district de Khwahan au Badakhshan, et l’interdiction faite aux femmes d’entrer dans les cliniques des provinces de Kandahar et de Farah.
Prolongation de l’interdiction d’emploi
Les talibans ont également continué de priver les femmes de leur droit au travail, notamment en leur interdisant de travailler dans les salons de beauté et les médias. Les rapports de la MANUA indiquent que les forces talibanes ont mené des perquisitions de maison en maison, confisquant les produits de beauté des femmes dans les salons. De plus, les talibans ont informé les stations de radio dirigées par des femmes dans plusieurs provinces qu’elles ne pouvaient opérer que si leurs licences de diffusion étaient enregistrées sous un nom masculin.
Violences sexistes à l’égard des femmes et des filles
Le 8 mars, Journée internationale des femmes, le porte-parole des talibans, Zabihullah Mujahid, a affirmé que « toutes les formes de violence et de mauvais traitements contre les femmes ont considérablement diminué » et que « les droits fondamentaux des femmes sont pleinement protégés par la charia islamique et les normes culturelles afghanes ». Cependant, la MANUA a documenté plusieurs cas de violence sexiste, notamment un cas où une femme a été forcée de se marier, et un autre où une femme victime de violences domestiques a été encouragée par les talibans à rester dans cette relation abusive.
Cour pénale internationale
Le 23 janvier, le procureur de la Cour pénale internationale (CPI) a annoncé que des mandats d’arrêt avaient été demandés contre Hibatullah Akhundzada , le chef suprême des talibans, et Abdul Hakim Haqqani , le président de la Cour suprême du groupe. Selon le communiqué, les éléments de preuve recueillis fournissent des motifs raisonnables de croire que les deux individus sont pénalement responsables, au titre du Statut de Rome, de crimes contre l’humanité, notamment de persécutions sexistes.
Le rapport aborde également la question des victimes civiles, principalement causées par les attaques de l’État islamique de la province du Khorasan (ISKP) et d’autres groupes armés qui ont revendiqué la responsabilité de plusieurs de ces incidents.
La MANUA signale également que les talibans continuent de pratiquer des châtiments corporels publics chaque semaine, parfois en masse. Le rapport fait état de châtiments collectifs, comme la flagellation publique de 18 personnes dans la province de Khost et de 13 autres à Sheberghan, capitale de la province de Jawzjan. Au total, la MANUA a recensé 180 cas de châtiments corporels durant cette période, concernant 142 hommes, 35 femmes et 3 filles.
Meurtres et détentions d’anciens membres des forces de sécurité
La MANUA a recensé au moins six meurtres d’anciens membres des forces de sécurité et 23 cas de détention arbitraire, ainsi qu’au moins cinq cas de torture et d’abus commis par les talibans sur d’anciens militaires et membres de la défense. Certaines de ces arrestations ont eu lieu dans les provinces du Panchir et de Kaboul, plusieurs détenus étant accusés d’appartenance au Front de résistance nationale.
Suppression des libertés fondamentales
Selon le rapport, les talibans ont continué d’interférer avec les activités des médias. Le 13 février, le ministère taliban de l’Information et de la Culture a donné l’ordre verbal aux médias de suspendre tous les talk-shows politiques jusqu’à nouvel ordre. De plus, les talibans ont imposé des règles strictes sur la collaboration des médias avec les médias en exil et de la diaspora. De ce fait, des journalistes ont été arrêtés pour avoir prétendument collaboré avec ces organisations interdites.
Suppression de la liberté religieuse
Entre le 17 janvier et le 3 février, les talibans auraient contraint au moins 50 adeptes de la secte ismaélienne du Badakhshan à se convertir à leur religion. La MANUA affirme que ces personnes ont été emmenées de force de nuit à leur domicile et interrogées sur leurs croyances religieuses. Ceux qui refusaient de se convertir ont été menacés de mort, battus et contraints. Les talibans ont également créé plusieurs écoles religieuses dans les zones à forte population ismaélienne et ont ordonné aux familles d’inscrire leurs enfants à un enseignement religieux sunnite.
Par ailleurs, la police des mœurs des talibans aurait imposé des règles strictes aux fidèles dans tout l’Afghanistan. Selon la MANUA, les talibans ont contraint les gens à fermer leurs commerces pour assister aux prières collectives et aux Tarawih. Ceux qui refusaient d’y participer étaient placés en détention et maltraités. Certains auraient été torturés dans les provinces de Helmand, Zabul et Samangan.
La MANUA a également évoqué les tensions frontalières entre les talibans et les forces pakistanaises. Des affrontements, notamment des bombardements aériens et des tirs croisés, dans les provinces de Paktika et de Nangarhar ont fait des victimes civiles. De plus, les restes d’engins explosifs laissés lors de conflits passés continuent de représenter une grave menace, en particulier pour les enfants. La MANUA a recensé 42 victimes liées à ces restes explosifs au cours de la période considérée.
Vous pouvez lire la version persane de ce rapport ici :
گزارش یوناما؛ طالبان به سرکوب آزادیهای اساسی و زنان ادامه دادند | روزنامه ۸صبح
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