Somnambulisme occidental face au retour du terrorisme en Afghanistan

On croirait rêver, ou plutôt assister à un cauchemar déjà vécu : celui d’un monde qui avance les yeux grands fermés vers une catastrophe annoncée. Tandis que l’Afghanistan s’enfonce chaque jour davantage dans le chaos sous le joug des Talibans, les signaux d’un nouveau cycle de terreur mondiale se multiplient — et personne, ou presque, ne semble vouloir les voir.

Les Nations unies, dans une série de rapports devenus quasi-routiniers, alertent depuis des mois : Al-Qaïda est de retour, mieux implantée que jamais. Des camps d’entraînement prospèrent dans plusieurs provinces afghanes, parfois à quelques kilomètres à peine de grandes villes. Des vidéos d’appel au djihad sont diffusées sur des réseaux discrets, traduites en plusieurs langues, préparées pour une diffusion virale. Des drones — armés et perfectionnés — circulent désormais entre les mains d’acteurs non étatiques, expérimentés sur les minorités récalcitrantes à l’intérieur du pays. Mais à Washington, à Paris, à Bruxelles, on détourne le regard, comme si répéter « nous ne voyons pas de menace imminente » suffisait à la faire disparaître.

Sarah Adams, ancienne analyste du renseignement américain, multiplie pourtant les alertes. Ses interventions, relayées par des spécialistes de terrain, s’appuient sur des données solides, sur des documents classifiés désormais rendus publics, sur des recoupements d’informations vérifiables. Elle prévient : l’Afghanistan est redevenu ce qu’il était dans les années 1990 — un sanctuaire de la terreur globale. Mais qui l’écoute ?

Du côté afghan, les résistants ne cessent de le dire. Le Front national de résistance, les anciens officiers de la défunte armée républicaine, les journalistes encore sur place ou en exil, les femmes en réseau clandestin : tous voient les choses s’organiser à une vitesse effrayante. Les caches d’armes sophistiquées se multiplient. Les connexions entre réseaux djihadistes transnationaux s’activent à nouveau, entre le Pakistan, l’Afghanistan, le Sahel, et la Syrie. Les Talibans ferment les yeux, ou facilitent. Ils accueillent, abritent, entraînent, trichent sur leur action pseudo-antiterroriste, pour continuer à recevoir les 40 millions de dollars des US chaque semaine !

Et pourtant, rien. Pas une déclaration officielle de l’OTAN. Pas un plan stratégique clair de lutte contre ce retour du monstre. Même le Pakistan, pourtant créateur et complice des talibans prend peur face à la montée des attaques sur son propre sol, comme si les capitales occidentales avaient tiré un trait sur l’Afghanistan et avec lui, sur toute velléité de vigilance antiterroriste sérieuse.

L’histoire bégaie avec un cynisme glaçant. Nous voilà ramenés, comme dans une boucle tragique, à l’été 2001. Les rapports s’accumulaient alors aussi, parlant de camps d’entraînement en Afghanistan, de militants formés, de la complicité pakistanaise. Mais aucun responsable n’agissait. Le 11 septembre, tout le monde a fait mine de tomber des nues. Vingt-quatre ans plus tard, il semble que nous n’ayons rien appris.

Il faut le dire avec force : ce qui se prépare en Afghanistan aujourd’hui n’est pas un simple problème régional. C’est une menace mondiale. Et la passivité des puissances occidentales face à la reconstitution méthodique d’un écosystème terroriste est une faute politique, stratégique, et morale.

On n’a pas le droit de laisser l’Histoire se répéter. Mais pour cela, encore faudrait-il avoir le courage d’ouvrir les yeux.

 

🔹 Rapports & Résolutions de l’ONU



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