OCHA’s humanitarian update on Afghanistan MAI 2025

Principaux faits nouveaux survenus récemment

L’Afghanistan continue de faire face à l’une des pires crises humanitaires du monde. Selon la mise à jour humanitaire du Bureau de la coordination des affaires humanitaires sur l’Afghanistan, publiée le 21 mai et couvre la période allant du 1er au 28 février, 23,7 millions d’Afghans – plus de la moitié de la population du pays – nécessitent une aide humanitaire.

Malgré l’ampleur de la crise, les acteurs humanitaires en Afghanistan sont confrontés à un grave déficit de financement qui compromet leurs efforts de fourniture de l’aide. Lors de sa visite en Afghanistan du 27 avril au 2 mai, le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires, Tom Fletcher, a averti que certaines organisations non gouvernementales locales prévoyaient de licencier la moitié de leur personnel et a noté que 400 dispensaires avaient fermé « au cours des dernières semaines ». Il y a plusieurs semaines, Mutinta Chimuka, Directrice par intérim du Programme alimentaire mondial (PAM), a déclaré aux journalistes que son organisme avait été contraint de réduire les rations et indiqué qu’il ne serait peut-être pas en mesure de fournir une aide alimentaire à tous ceux qui en avaient besoin en 2025.

La décision de l’administration Trump de suspendre tout le financement restant pour l’aide humanitaire en Afghanistan devrait avoir un impact significatif sur les opérations humanitaires dans le pays. Dans une mise à jour du 22 avril, le Bureau de la coordination des affaires humanitaires a averti que plusieurs millions de personnes en moins recevraient une aide humanitaire en 2025 sans financement américain, notant qu’à la fin du mois de février, 7,3 millions de personnes ont reçu une aide humanitaire en Afghanistan, contre 8,6 millions au cours de la même période de deux mois en 2024.

Lire le rapport : https://reliefweb.int/report/afghanistan/afghanistan-humanitarian-update-february-2025

Télécharger version française : https://lalettrehebdo.com/wp-content/uploads/2025/06/OCHA-MAI-2025.pdf



Afghanistan : l’abîme humanitaire, après le retrait brutal de l’aide américaine

L’Afghanistan n’a jamais cessé d’être en crise, mais la suspension unilatérale de l’aide humanitaire américaine, annoncée le 20 janvier 2025, a jeté une population entière dans le vide. Déjà à bout de souffle après des années de guerre, d’instabilité politique, de catastrophes naturelles et de répression, les Afghanes et les Afghans sont désormais privés de l’une des rares lignes de survie qui leur restait.

L’effet domino d’une décision politique

La décision américaine a provoqué une onde de choc immédiate. En quelques semaines, 188 centres de santé ont fermé, privant 1,6 million de personnes de soins essentiels. 1 700 femmes — sages-femmes, infirmières, aides-soignantes — ont perdu leur emploi. Les programmes de déminage, cruciaux dans un pays truffé d’engins explosifs, sont à l’arrêt. Les aides financières destinées à 7 000 foyers vulnérables sont gelées.

Mais ce ne sont pas que des chiffres. Ce sont des enfants privés de médicaments, des femmes enceintes sans assistance, des populations déplacées qui n’ont plus rien à manger. Ce sont aussi 30 organisations dirigées par des femmes contraintes de suspendre leurs services d’urgence pour d’autres femmes et filles déjà sous le joug des Talibans.

Une aide décisive pour 20 millions de personnes

En 2024, l’aide humanitaire internationale — financée à 47 % par les États-Unis — avait permis d’atteindre 20,4 millions de personnes. Cela représentait la moitié de la population du pays. Parmi elles, 6 millions de femmes et 5,1 millions de filles. 14,9 millions de personnes avaient reçu une aide alimentaire d’urgence, bien souvent la seule chose qui les protégeait de la famine.

Les provinces les plus touchées — Badakhshan, Balkh, Kunar, Nangarhar, Takhar… — étaient ciblées en priorité en raison d’une combinaison dévastatrice : insécurité alimentaire, malnutrition, effondrement des services de santé, déplacements internes massifs, catastrophes naturelles.

Aujourd’hui, ces mécanismes sont en train de s’effondrer. Non seulement le retrait américain prive les agences d’une manne financière vitale, mais il fait tache d’huile : d’autres bailleurs hésitent à s’engager, redoutant l’instabilité politique ou l’inefficacité opérationnelle.

Catastrophes naturelles : l’autre guerre silencieuse

Février 2025 a rappelé à quel point l’Afghanistan est vulnérable à une crise climatique qui ne pardonne pas. Des inondations et avalanches ont frappé 16 provinces, causant 38 morts et 168 blessés. Plus de 11 500 personnes ont perdu leur logement, leur récolte, parfois leurs proches.

Dans ce chaos, l’histoire de Bibi Sargol, une grand-mère de Faryab, résonne comme un cri d’alarme. Son foyer a été balayé par une crue subite, sa maison détruite, ses souvenirs engloutis dans la boue. Aujourd’hui, elle vit dans une tente, exposée au froid glacial avec huit petits-enfants. « Si personne ne nous aide à reconstruire, nous mourrons dehors », dit-elle.

Son appel est universel. Il reflète ce que vivent des milliers de familles afghanes : l’abandon, l’invisibilité, l’épuisement.

Urgence absolue

L’Afghanistan est en train de basculer. La coupure de l’aide n’arrive pas dans un pays stable, mais dans un territoire miné par les inégalités, les persécutions, les catastrophes et un pouvoir autoritaire. Sans une mobilisation internationale immédiate, le système humanitaire ne tiendra pas. Et ce sont des millions de personnes qui tomberont dans le gouffre.

L’aide humanitaire ne peut pas être un levier de chantage ou un instrument politique. Elle est une obligation morale. L’Afghanistan, aujourd’hui, n’a pas besoin de promesses : il a besoin d’actes. De financements, de coordination, de courage.

L’heure n’est plus à la prudence diplomatique, mais à la survie.



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