ISKP : Aux portes du chaos, l’autre menace djihadiste en Afghanistan
ISKP, know the ennemy
ISKP : Aux portes du chaos, l’autre menace djihadiste en Afghanistan
d’après un document de Sarah Adams @TPASarah, ancien membre de la Central Intelligence Agency (CIA), et l’équipe de publication de « Benghazi, know the ennemy » ainsi que des sources fiables mais anonymisées en raison de l’objet même du rapport
ISKP : Connais ton ennemi : http://bit.ly/4lvfoCy
AVERTISSEMENT : Contient des images très explicites, notamment des preuves de crimes de guerre commis par les talibans. La prudence est recommandée.
Par-delà les crêtes arides de la province afghane du Nangarhar, une menace persiste, insaisissable et meurtrière. Tandis que les Talibans consolident leur pouvoir depuis la chute de Kaboul en août 2021, un autre groupe terroriste tisse sa toile dans l’ombre : l’État islamique au Khorasan, ou ISKP. Moins médiatisé que son « cousin » du Moyen-Orient, ISKP n’en demeure pas moins l’un des groupes djihadistes les plus violents et idéologiquement intransigeants de la région. « Connaître son ennemi », tel est le mot d’ordre du rapport récemment publié, intitulé ISKP: Know Thy Enemy, qui lève le voile sur les arcanes de cette organisation.
Une naissance au carrefour des conflits
Fondé en janvier 2015, ISKP revendique l’héritage idéologique de l’État islamique, mais sur un territoire historique : le Khorasan, entité géopolitique médiévale englobant Afghanistan, Pakistan, Iran et Asie centrale. Ses membres fondateurs sont pour la plupart d’anciens talibans dissidents, des militants du Tehrik-e-Taliban Pakistan (TTP) ou des étrangers venus du Caucase, de Russie, ou encore d’Asie centrale. Dès ses débuts, le groupe affiche un rejet total de toute forme de compromis politique, y compris ceux que les Talibans ont pu envisager avec l’Occident.
Une idéologie de rupture
ISKP se distingue par une lecture ultra-radicale du jihad. Pour ses membres, les Talibans sont des apostats, coupables d’avoir trahi les préceptes de l’islam en négociant avec les Américains et en tolérant des minorités religieuses. La haine d’ISKP s’étend bien au-delà : chiites, soufis, Hindous, musulmans laïcs, Occidentaux… Tous sont perçus comme des cibles légitimes. Le groupe prône une vision messianique d’un califat mondial, purifié de toute déviance.
Une guerre dans la guerre
Depuis la prise de pouvoir des Talibans, ISKP n’a cessé de multiplier les attaques contre les nouvelles autorités de Kaboul, dénoncées comme traîtres à l’islam. Attentats-suicides, assassinats ciblés, attaques contre des mosquées chiites ou des hôpitaux : le groupe frappe vite, fort, et sans distinction. L’objectif ? Déstabiliser le pays, délégitimer les Talibans, et rallier les plus radicaux à sa cause.
Une menace transnationale
L’influence d’ISKP déborde largement des frontières afghanes. Des combattants étrangers sont identifiés dans ses rangs, venus d’Asie centrale, du Caucase, mais aussi parfois d’Europe. Le groupe tisse des liens avec des entités comme le TTP pakistanais ou des cellules clandestines en Inde et au Tadjikistan. Les craintes de frappes au-delà de la région sont réelles, à l’image des menaces proférées contre des ambassades ou des minorités dans les pays voisins.
Le pouvoir des mots : une guerre médiatique
À l’image de l’État islamique en Syrie et en Irak, ISKP maîtrise l’art de la propagande. Via des canaux numériques sophistiqués, il diffuse sa vision du monde en pachto, dari, arabe, anglais ou russe. Sa rhétorique : dénoncer la trahison talibane, glorifier le martyr, et appeler à la mobilisation mondiale. Les jeunes, notamment, sont la cible privilégiée de ce discours viral et polarisant.
Face à la terreur, une réponse fragmentée
Les Talibans, bien qu’ennemis jurés d’ISKP, peinent à enrayer sa progression. Les opérations de contre-insurrection lancées dans les provinces de l’Est restent limitées, tant par manque de moyens que par défiance des populations locales. Les voisins de l’Afghanistan, eux, renforcent leurs frontières, inquiets des infiltrations. Mais face à une organisation agile, décentralisée et motivée par une idéologie de fin du monde, la réponse internationale reste embryonnaire.
Un ennemi à surveiller
Loin d’être un résidu post-califat, ISKP s’impose aujourd’hui comme une menace stratégique de premier ordre. Sa capacité à frapper dans les centres urbains, à mobiliser au-delà des frontières, et à maintenir une cohérence idéologique fait de lui un adversaire redoutable. Alors que l’attention du monde se détourne lentement de l’Afghanistan, le groupe pourrait bien profiter du silence pour renforcer ses positions.
Dans une région déjà minée par l’instabilité, ISKP est la preuve vivante qu’un conflit n’efface pas l’autre. Face à cette hydre idéologique, la vigilance n’est pas une option, mais une nécessité.
A propos de « Benghazi, know the ennemy » by Sarah Adams (Author), Dave Benton (Author)
À partir du 11 septembre 2012, Al-Qaïda a perpétré une série d’attentats terroristes contre le consulat américain et l’annexe de la CIA à Benghazi, en Libye, tuant quatre Américains, dont l’ambassadeur américain Christopher Stevens. Avec plus de 150 assaillants rien que pour le consulat, cet attentat est le plus important de l’histoire contre une mission diplomatique américaine. Pourtant, l’affaire est restée non résolue. Les terroristes n’ont jamais été traduits en justice, n’ayant pas été identifiés jusqu’à présent.
Deux anciens agents de la Central Intelligence Agency (CIA), impliqués dans la crise libyenne avant, pendant et après les attentats, ont décidé d’empêcher qu’un attentat terroriste d’Al-Qaïda ne devienne une affaire classée.
Plus récemment : Al-Qaïda 2.0 : l’attaque imminente contre les États-Unis et l’Europe dévoilée (Understanding Global)
A propos de Sarah Adams : Sarah était analyste du renseignement et chargée de cibler les attaques au sein de la Central Intelligence Agency (CIA). Elle a également été conseillère principale auprès de la commission spéciale de la Chambre des représentants des États-Unis sur Benghazi et co-auteure du rapport du comité Benghazi : proposition de rapport de la commission spéciale sur les événements entourant l’attaque terroriste de 2012 à Benghazi (ISBN 978-1534994065, juillet 2016). L’auteure a également dirigé les travaux de recherche et développement du ministère de la Défense (DoD) visant à découvrir, incuber et proposer des solutions innovantes, basées sur les données et la technologie, pour répondre aux défis complexes de sécurité nationale.
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