Les grandes oubliées de l’aide humanitaire : les femmes afghanes étouffées sous les décombres du patriarcat
🟦 Afghanistan – Avril 2025
Les grandes oubliées de l’aide humanitaire : les femmes afghanes étouffées sous les décombres du patriarcat
Depuis le retour au pouvoir des talibans en 2021, les femmes et les filles afghanes vivent sous un régime de plus en plus oppressif. Un rapport accablant d’ONU Femmes, publié en avril 2025, dresse un tableau noir de leur exclusion des services de base et de l’aide humanitaire. Un système devenu aveugle au genre, inefficace, et profondément injuste.
Une vie cloîtrée, sous surveillance
Les mesures adoptées par les autorités de facto en Afghanistan ont abouti à une réclusion quasi totale des femmes. L’obligation d’être accompagnées d’un mahram (tuteur masculin), le port du niqab ou de la burqa, et l’interdiction de travailler pour les ONG ou l’ONU ont éradiqué leur présence dans l’espace public.
Une loi de 2024 sur la « Promotion de la vertu » a enfoncé le clou, interdisant même aux femmes de chanter en public, d’apparaître non voilées dans les transports, ou d’accéder seules aux services de santé. Résultat : elles disparaissent aussi des radars de l’aide humanitaire.
L’éducation, grande sacrifiée
En 2024, seules 43 % des filles étaient scolarisées contre 71 % des garçons. Pire : aucune fille entre 13 et 17 ans n’a pu fréquenter l’école secondaire. Cette exclusion massive prive les jeunes Afghanes d’un avenir, renforce la pauvreté, et réduit la présence féminine dans des secteurs cruciaux comme la santé ou l’enseignement. Un effondrement aux conséquences systémiques.
Santé, nutrition, logement : des inégalités mortelles
- Santé : absence de professionnelles, restrictions de déplacement, et obstacles financiers compromettent gravement l’accès aux soins, notamment maternels.
- Nutrition : les femmes enceintes ou allaitantes souffrent d’un déficit alimentaire critique.
- Logement : les foyers dirigés par des femmes (10 % des ménages) vivent dans des abris précaires, avec des risques accrus d’insécurité et d’exposition au froid.
Quand l’aide humanitaire ne voit plus les femmes
Le constat est alarmant : 70 % des femmes interrogées déclarent avoir des difficultés d’accès à l’aide humanitaire, en raison du manque de personnel féminin, d’interdictions de déplacement, ou d’une information inaccessible. Les ONG dirigées par des femmes – pourtant clés pour toucher les communautés féminines – sont étouffées par les restrictions administratives et financières.
Les pistes de survie : recommandations de l’ONU
Le rapport appelle à une série de mesures concrètes :
- Intégrer systématiquement la dimension de genre dans tous les programmes humanitaires.
- Soutenir les travailleuses humanitaires locales, en finançant notamment la présence de mahrams.
- Protéger et financer les organisations dirigées par des femmes.
- Prioriser la santé mentale, l’éducation et l’accès à l’information pour les femmes.
- Créer des canaux de retour d’information sûrs et accessibles pour qu’elles puissent exprimer leurs besoins.
Une conclusion qui résonne comme un appel
L’ONU ne mâche pas ses mots : l’exclusion actuelle des femmes n’est pas seulement une crise humanitaire, c’est une crise de civilisation. La réponse internationale, si elle veut être digne de ce nom, doit replacer les femmes au centre. Non pas comme bénéficiaires passives, mais comme actrices à part entière de la résilience et de l’avenir afghan.
✒️ La rédaction – La Lettre d’Afghanistan
D’après le rapport « Femmes et filles en crise », ONU Femmes, avril 2025
Comments are closed