La terreur sous le voile : violences physiques et rafles arbitraires contre les femmes afghanes

Depuis leur retour au pouvoir en août 2021, les talibans ont instauré en Afghanistan un régime de terreur sexiste, structuré autour d’un appareil répressif religieux : la police des mœurs. Ce ministère orwellien, nommé de façon cynique Propagande de la vertu et Prévention du vice, a pour mission de surveiller, punir et briser les femmes. Le hijab est désormais un prétexte à l’humiliation publique, à la violence physique, à la détention arbitraire. Dans tout le pays, mais surtout à Kaboul, les témoignages s’accumulent : femmes électrocutées en pleine rue, jeunes filles battues dans les centres commerciaux, mères de famille raflées dans les hôpitaux, lycéennes interdites d’école sans masque facial.
Ce n’est plus une série de faits isolés : c’est un système d’oppression, organisé, assumé, fondé sur la peur et la douleur.
L’électricité comme châtiment : un usage de la torture devenu routinier
Les témoignages publiés par Rukhshana Media décrivent l’inimaginable. Des femmes reçoivent des décharges électriques au cou ou au dos pour avoir porté un hijab jugé inadéquat. Nafisa, 20 ans, raconte son arrestation à Kaboul : une décharge brutale, une perte de connaissance, une cellule sombre partagée avec d’autres prisonnières, et des mois de traitement antidépresseur ensuite. Sa sœur a assisté à la scène impuissante, terrorisée par le silence imposé à la population. Ces scènes se répètent dans les rues, les marchés, les postes de police.
Dans une société sans contre-pouvoir, l’électricité devient une arme de soumission. Les officiers n’ont ni badge, ni nom, ni cadre légal. Ils frappent, électrocutent, enlèvent.
Un appareil répressif qui rafle les femmes dans la rue, les écoles, les hôpitaux
La semaine du 15 au 20 juillet 2025 a été marquée par une vague d’arrestations massives de jeunes femmes dans Kaboul. Des dizaines d’entre elles ont été raflées dans les quartiers de Tank-e-Til, Qala-e-Fathullah, Kote Sangi, Shahr-e Naw, Dasht-e Barchi, mais aussi à l’intérieur de centres commerciaux, de restaurants et même d’hôpitaux.
Dans Qala-e-Fathullah, des femmes ont été arrêtées sans explication, les agents talibans pénétrant dans les lieux publics pour les emmener de force. À Kote Sangi, des témoins ont vu des femmes rouées de coups avant d’être jetées dans des véhicules. Aucun agent féminin n’était présent, en violation flagrante même des principes islamiques les plus élémentaires.
Ces rafles ont été précédées d’instructions claires envoyées via WhatsApp à des responsables communautaires : toute femme ne respectant pas « le hijab tel que requis par la charia » doit être arrêtée et traitée « selon les règles islamiques ». Les détenues n’ont pas été inculpées. Elles sont souvent libérées après avoir signé un engagement écrit à se conformer strictement aux règles vestimentaires, sous surveillance masculine.
Écoles interdites, voiles imposés, corps disciplinés
Les talibans ont également ordonné aux écoles de refuser l’entrée aux filles ne portant pas de voile intégral avec masque facial. Celles qui refusent ou tentent de protester sont arrêtées. Des vidéos circulent montrant des femmes encerclées, insultées, emmenées par des hommes armés. Dans l’une d’elles, une jeune femme hurle : « Vous nous avez privés de vie, d’école, d’éducation. Que voulez-vous de plus ? Craignez Dieu ! »
La torture comme méthode d’interrogatoire
Les décharges électriques ne s’arrêtent pas à la rue. Elles sont aussi utilisées en prison. Zarifa Yaqubi, militante des droits des femmes, a passé 41 jours en détention, soumise à la torture pour l’obliger à avouer. Parwana Ibrahimkhil Najrabi, détenue pendant un mois, rapporte également avoir été électrocutée lors de son arrestation. Ces méthodes, contraires à toutes les conventions internationales, sont systématisées. En janvier 2022 déjà, les talibans utilisaient des tasers contre des femmes manifestant pacifiquement dans les rues de Kaboul.
Mensonges officiels et absence totale de justice
Interrogé sur ces vagues d’arrestations, le porte-parole du ministère du Vice et de la Vertu nie tout en bloc. Mais les vidéos, les témoignages directs et les multiples rapports indépendants confirment la brutalité. Le déni n’est pas seulement une stratégie politique : c’est une violence supplémentaire, une tentative d’effacer jusqu’à la mémoire de ce que vivent les femmes.
Une politique d’apartheid de genre en actes
Ce que révèlent ces faits, ce n’est pas simplement une série de violations des droits humains : c’est un système de domination sexuelle et idéologique. Les femmes ne sont plus citoyennes. Elles ne sont plus étudiantes, ni médecins, ni mères libres. Elles sont des cibles. Des êtres à soumettre, à punir, à cacher. L’Afghanistan des talibans est aujourd’hui le théâtre d’un apartheid de genre, où la violence physique – jusque dans l’électricité – devient une forme de gouvernement.
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