Déclaration de Sima Samar

Sima Samar, ancienne présidente de la Commission indépendante des droits de l’homme d’Afghanistan, a déclaré hier soir lors d’un Space en direct organisé par la chaîne télévisée Diyar que pour mettre fin à la situation actuelle, les femmes et les hommes d’Afghanistan doivent “se dresser” contre les Talibans, insistant sur la nécessité d’un “changement de l’intérieur”. Elle a averti que le silence de la population contribuait à la pérennité du régime taliban.

Samar a ajouté : « Jusqu’à quand devons-nous attendre les autres ? La communauté internationale est déjà intervenue une fois, mais après vingt ans, les Talibans sont finalement revenus au pouvoir. » Elle a souligné que le peuple afghan joue un “rôle clé” dans le processus de changement politique du pays.

Cette figure reconnue des droits humains en Afghanistan a également déclaré que la violation des droits des femmes ne détériore pas uniquement leur situation de vie, mais affecte l’ensemble des citoyens du pays. Selon elle, cette question a un impact non seulement sur l’économie, mais aussi sur le développement, la paix et le niveau de violence dans la société.

Elle a insisté sur le fait qu’il ne fallait pas uniquement blâmer le peuple afghan pour l’ascension des Talibans au pouvoir. Selon elle, la communauté internationale doit aussi reconnaître sa part de responsabilité dans les conditions ayant permis le retour de ce groupe.

Dans ce discours, Sima Samar a qualifié de « douloureuse » la “normalisation” des violations des droits humains en Afghanistan. Selon elle, l’une des raisons pour lesquelles la communauté internationale ne fait pas pression de manière suffisante sur les Talibans est que la chute du gouvernement républicain a été un échec collectif, que de nombreux pays préfèrent ne pas se remémorer. Pourtant, elle a estimé qu’il est essentiel de tirer les leçons de cette expérience afin d’éviter la répétition des mêmes erreurs.

Lors de ce programme intitulé « Femmes, droits humains et avenir incertain de l’Afghanistan », Sima Samar a rappelé que le ministère des Affaires féminines avait été établi à force d’efforts, mais que les Talibans, dès leur retour au pouvoir, ont dissous cette institution et l’ont remplacée par un organisme dont 98 % des activités consistent à imposer des restrictions aux femmes.

Elle a précisé que les membres des Talibans sont issus du système éducatif des madrasas dans les camps de réfugiés, et que, par conséquent, la simple réouverture des écoles ne suffit pas : il faut aussi insister sur la qualité de l’enseignement. Sinon, selon elle, un changement des contenus éducatifs conduira à l’émergence d’une génération « extrémiste et fondamentaliste ».

Elle a appelé la communauté internationale à empêcher que la violation des droits humains en Afghanistan ne devienne une “normalité” et à exercer une pression sur les Talibans pour qu’ils révisent leurs politiques. L’un des moyens efficaces, selon elle, serait de sanctionner davantage de responsables talibans impliqués dans ces violations. Une autre solution consisterait à renforcer la société civile, en particulier les médias, afin qu’ils puissent documenter et archiver ces abus.

Saluant l’initiative de la Cour pénale internationale d’émettre un mandat d’arrêt contre Hibatullah Akhundzada, le chef des Talibans, et contre Abdul Hakim Haqqani, président de leur Cour suprême, elle a dit ne pas être très optimiste quant à l’exécution de ces mandats, mais elle a tout de même qualifié cette action de « pas important » vers la responsabilisation des Talibans.

Samar a enfin souligné que la documentation des violations des droits humains en Afghanistan n’est pas seulement importante pour exiger des comptes aux responsables, mais aussi pour l’histoire et pour les générations futures. Ces actions sont nécessaires, selon elle, pour empêcher la répétition de ces injustices et pour que la justice soit pleinement rendue.

Elle a conclu en disant que si la communauté internationale « en avait réellement la volonté », il ne serait même pas nécessaire de faire reconnaître officiellement “l’apartheid de genre” comme un “crime contre l’humanité” : les violences fondées sur le genre suffisent à elles seules pour que les Talibans soient tenus responsables.



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