⚠️ Dernière minute

Les talibans poursuivent leur entreprise de destruction méthodique de la société afghane. Après avoir interdit aux femmes l’école, le sport et le travail, ils franchissent un nouveau seuil en bannissant tous les livres écrits par des femmes. Même la voix sur papier devient un crime.

Parallèlement, la coupure de l’Internet par fibre optique et WiFi dans plusieurs provinces plonge le pays dans l’isolement. Les filles ne peuvent plus accéder à l’éducation en ligne, les journalistes sont réduits au silence, les artistes interdits d’expression, et les citoyens privés du droit fondamental d’informer le monde.

Ce blackout numérique ouvre un boulevard à l’impunité : tortures, disparitions, violences de genre ne pourront plus être documentées. Dans ce silence imposé, Al-Qaïda et d’autres groupes terroristes trouvent un espace sans contrôle.

L’économie numérique, seul souffle d’espoir pour une jeunesse inventive, s’effondre. Et la communauté internationale demeure spectatrice.

La Lettre d’Afghanistan 17 septembre 2025 – numero 39

Édito — Afghanistan : les enfants condamnés à une double peine

Une fois encore, l’Afghanistan paie le prix le plus cruel d’une catastrophe naturelle. Le séisme du 31 août, qui a frappé Kunar et Nangarhar, a fait plus de 2 000 morts. Mais derrière ce chiffre glaçant se cache une vérité encore plus insupportable : la moitié des victimes sont des enfants. Plus de 1 100 d’entre eux ont perdu la vie, des centaines ont été blessés, orphelins ou séparés de leurs familles.

L’UNICEF rappelle que ce ne sont pas seulement des chiffres : ce sont des visages, des frères et des sœurs arrachés à la vie, des petites filles portant leurs cadets blessés à travers les ruines, des enfants désormais seuls dans un pays déjà fracturé par la guerre et l’extrême pauvreté.

Et comme si la mort et les décombres ne suffisaient pas, d’autres menaces guettent les survivants. Les filles, en particulier, sont exposées à des risques accrus de mariages précoces et forcés, à l’abandon scolaire, à la malnutrition et à l’absence de soins. Dans les montagnes isolées de l’est afghan, chaque chemin vers l’aide devient un parcours d’obstacles, chaque retard une condamnation.

Le représentant de l’UNICEF en Afghanistan, le Dr Tajudeen Oyewale, a lancé un appel clair : il faut agir maintenant, avant l’hiver, avant que la tragédie ne se double d’une hécatombe silencieuse. Les besoins sont immenses : abris, nourriture, soins, soutien psychologique. L’UNICEF demande 22 millions de dollars pour protéger plus de 200 000 enfants.

Chaînes de pauvreté et mariages forcés : à Hérat, vendre ses enfants devient une stratégie de survie

Depuis le retour des talibans et la fermeture des écoles aux filles, les mariages précoces et forcés explosent en Afghanistan. À Hérat, ils ne sont plus seulement une coutume, mais une stratégie de survie pour des familles écrasées par la pauvreté. Dans certains villages, des enfants sont promis dès leur plus jeune âge, parfois échangés contre du bétail ou de l’argent, mariés à partir de 12 ou 13 ans à des hommes adultes. La polygamie y est non seulement courante mais valorisée : avoir deux épouses est considéré comme un signe d’honneur et de puissance.

Le rapport recueille des témoignages bouleversants. Fereshta confie avoir promis sa fille de six mois contre 80 moutons et 100 000 afghanis. Nasima raconte avoir été promise à deux ans, mariée à neuf, comme ses six sœurs avant elle. Sara admet avoir marié sa petite-fille de 13 ans en échange de bétail et d’argent. Certaines familles vont plus loin encore, vendant leurs enfants avant même la naissance, faute de nourriture. Des mères racontent avoir cédé leur bébé quelques jours après l’accouchement, souvent sans recevoir l’argent promis.

Cette marchandisation de l’enfance s’accompagne d’une explosion de la violence domestique. Certaines adolescentes, enfermées dans ces unions forcées, en viennent à commettre l’irréparable pour fuir les abus. Dans ce contexte, les mariages d’enfants ne détruisent pas seulement l’avenir des filles, ils les privent de leur dignité, de leur liberté et parfois de leur vie.

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Un groupe de réflexion basé au Pakistan, nommé South Asian Strategic Stability Institute, tient une réunion à huis clos de deux jours avec plusieurs figures autoproclamées de l’opposition afghane.

En participant, ces personnalités, qui se présentent comme des voix anti-talibans, accordent au Pakistan un rôle de médiateur.

Ce faisant, ils donnent également une légitimité politique et morale à un État qui, pendant deux décennies, a fourni un refuge et un soutien aux talibans pendant que l’Afghanistan saignait. Cela soulève de sérieuses questions sur la crédibilité de ceux qui parcourent les couloirs des capitales occidentales, frappant aux portes pour obtenir du soutien tout en se présentant comme des figures anti-talibans.
Ce n’est pas une question de préférence personnelle, mais de cohérence éthique et politique.
Le soutien de hashtag#Pakistan aux talibans depuis des décennies n’est pas contesté, mais est bien documenté par l’United Nations, les services de renseignement américains et les organismes de surveillance internationaux.

Assister à une conférence sur la lutte contre les talibans en hashtag#Pakistan revient à ignorer ce record indéniable et à envoyer un message dangereux : l’État même qui a incubé les talibans peut maintenant être un partenaire crédible.

Ce n’est pas de la diplomatie.
C’est légitimer.

Le principe est simple et universel : vous ne donnez pas le pouvoir à celui qui est à l’origine de ce que vous considérez comme la violence, le terrorisme et le crime de mener la conversation sur la justice.

En cherchant des solutions dans hashtag#Pakistan, les participantes sapent la crédibilité de leur plaidoyer et affaiblissent la force morale de l’appel hashtag#global pour la hashtag#rights des femmes dans hashtag#Afghanistan.

Freshta Jalalzai


L’Afghanistan privé d’air : la coupure d’internet, nouvelle arme des Talibans

Les Talibans viennent de franchir une étape supplémentaire dans leur entreprise d’étouffement de la société afghane : la coupure de l’internet par fibre optique, sur ordre direct du mollah Hibatullah Akhundzada. Officiellement, il s’agirait de « prévenir les activités immorales ». En réalité, cette mesure signe une volonté de réduire au silence une population déjà privée d’école, d’information et de liberté.

À Mazar-e-Charif, capitale du Balkh, les habitants ont vu disparaître du jour au lendemain leurs réseaux Wi-Fi, en particulier ceux fournis par Afghan Telecom. Les conséquences ont été immédiates et dévastatrices : services de l’État paralysés, passeports impossibles à délivrer, douanes incapables de fonctionner, banques et administrations réduites à l’impuissance. Dans un pays déjà ravagé par l’isolement diplomatique et l’effondrement économique, c’est un coup de massue supplémentaire. Même des responsables talibans commencent à s’inquiéter. Selon Amu TV, six ministres doivent se rendre à Kandahar pour convaincre leur leader de revenir sur sa décision, tant le coût administratif et économique est lourd.

La mesure n’est plus limitée au nord du pays. Des sources locales ont confirmé à Amu TV que les services fournis par Afghan Telecom ont également été coupés mardi après-midi dans la province de Kandahar, berceau historique du régime. Cette extension fait craindre une généralisation des coupures dans tout le pays. Déjà, les arrêts de service à Balkh ont provoqué le chaos dans les administrations publiques, et les habitants comme les défenseurs des médias dénoncent une nouvelle étape vers l’isolement de l’Afghanistan du reste du monde. Les Talibans n’ont pas précisé si cette interdiction à Kandahar sera permanente ni si elle sera étendue à l’ensemble du territoire.

Mais c’est surtout pour la jeunesse que cette coupure est une tragédie. Dans un Afghanistan où les filles sont interdites d’université et de la plupart des écoles secondaires, internet restait l’un des rares espaces d’apprentissage, de respiration et de lien avec le monde extérieur. Les cours en ligne, déjà fragiles, sont désormais inaccessibles. Pour les étudiants comme pour les enseignants, il ne reste qu’un mobile data lent, coûteux et instable – une option illusoire pour des familles appauvries.

L’Afghanistan rejoint ainsi la liste des pays où le pouvoir utilise l’arme de la coupure d’internet comme moyen de contrôle politique et social. On se souvient du Népal, où le blocage des réseaux avait suscité la colère des jeunes et révélé combien une génération connectée ne peut plus accepter d’être réduite au silence. À l’heure où l’internet est devenu pour toutes les jeunesses du monde une condition de survie culturelle, éducative et sociale, ces coupures résonnent comme une violence insupportable.

Derrière les discours de « moralité », il s’agit en réalité d’un verrouillage : empêcher la circulation de l’information, briser la solidarité en ligne, isoler encore davantage un peuple pris en otage. Les Talibans ne se contentent pas de fermer les écoles et les universités aux filles, ils veulent aussi fermer les fenêtres numériques qui reliaient les jeunes Afghans au reste du monde.

La coupure d’internet, d’abord à Balkh puis à Kandahar, pourrait n’être que le début d’un processus appelé à s’étendre. Elle illustre une dérive autoritaire universelle : le contrôle des réseaux comme instrument de domination. Mais en Afghanistan, elle prend une dimension tragique, car elle s’ajoute à une longue liste d’interdictions et d’humiliations. Couper l’internet, c’est couper l’avenir.


Le secteur minier en Afghanistan: une image en noir et en or

L’Afghanistan vit aujourd’hui au rythme de ses mines. Depuis la chute de la République en 2021, l’Émirat islamique (Talibans) a fait du charbon et de l’or la clé de son financement, remplaçant l’aide internationale par une rente d’extraction. Les recettes fiscales issues du charbon exporté vers le Pakistan sont devenues vitales pour le régime, tandis que l’or du Badakhshan et du Takhar attire investisseurs nationaux et étrangers. Mais derrière ces chiffres mirobolants se cachent des réalités sombres : travail artisanal dangereux, accidents meurtriers, marginalisation des communautés locales, exclusion des mineurs traditionnels au profit de compagnies liées au pouvoir, déforestation et pollution.

Le rapport de référence de Fabrizio Foschini pour l’Afghanistan Analysts Network (AAN), août 2025, dresse un tableau saisissant : annonces de contrats milliardaires, mais mise en œuvre limitée ; mainmise de la National Development Corporation sur les sites stratégiques ; contestation locale réprimée, comme à Balkhab. Le sous-sol devient ainsi une arme économique et politique, instrumentalisée pour briser l’isolement diplomatique et renforcer le contrôle social.

Un constat s’impose : tant que la mine sera exploitée comme une rente immédiate plutôt que comme une ressource à transformer et partager, elle restera une richesse illusoire.

📖 Lire le rapport complet sur le site de l’AAN : Afghanistan Analysts Network – The Mining Sector in Afghanistan: A Picture in Black and Gold


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