Interview exclusive du chef du NRF : l’Afghanistan ne restera pas sous l’emprise des talibans

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Interview exclusive du chef du NRF : l’Afghanistan ne restera pas sous l’emprise des talibans

Mukhtar Wafayee 23/02/2025

Dans une interview exclusive avec Ahmad Massoud, le leader du Front de résistance nationale d’Afghanistan (NRF), je l’ai interrogé sur les résultats de trois ans et demi de lutte armée et politique contre le régime taliban, les tournants de cette résistance et l’avenir de la guérilla contre les talibans. 

Cette interview a été publiée dans Independent Persian, et je partage ici sa version anglaise.

 

Interview exclusive du chef du NRF : l'Afghanistan ne restera pas sous l'emprise des talibans

Ahmad Msoud et Mukhtar Wafayee

Ahmad Massoud, chef du Front de résistance nationale d’Afghanistan (NRF), a déclaré dans une interview exclusive accordée à Independent Persian à Vienne, en Autriche, que les talibans, tout comme les forces soviétiques au Panchir, ont établi des camps militaires dans la région, mais qu’ils subiront le même sort. Il a affirmé que les forces anti-talibans reprendront tôt ou tard chaque pierre et chaque arbre de la patrie par la résistance armée et les efforts politiques.

Le dirigeant du NRF, qui se trouvait en Autriche pour assister à la cinquième conférence du « Processus de Vienne pour un Afghanistan démocratique », a répondu à une question concernant les tournants clés après trois ans et demi de lutte armée et d’efforts politiques, en déclarant :

« Le refus du peuple de se rendre aux talibans, sa détermination inébranlable et sa lutte continue, tant militaire que politique, pour la justice, sont les aspects déterminants de nos efforts. »

Massoud a reconnu que des facteurs géopolitiques ont empêché le changement majeur que beaucoup attendaient en Afghanistan. Il a toutefois souligné que la situation évolue :

« Un peuple qui refuse l’humiliation connaîtra finalement la victoire. Je suis convaincu que tôt ou tard, nous assisterons à ces grands changements. »

 

La stratégie de guérilla de la NRF

Depuis l’effondrement de la République afghane le 15 août 2021, les forces du NRF, dirigées par Ahmad Massoud, combattent les talibans dans plusieurs provinces d’Afghanistan. Après des combats acharnés et meurtriers au Panchir en 2021 et 2022, le NRF a réorienté sa stratégie militaire, passant des confrontations directes à la guérilla urbaine contre les talibans.

Selon les données publiées par le service de presse de la NRF, ses forces ont mené 27 attaques dans 10 provinces en janvier, faisant 42 morts et 37 blessés parmi les talibans. Cependant, les talibans ont nié ces attaques et empêché les médias locaux d’accéder aux détails des incidents.

Malgré cela, Ahmad Massoud reste convaincu que les talibans connaîtront finalement le même sort que les forces soviétiques qui ont envahi l’Afghanistan dans les années 1980.

« Les étrangers et les terroristes se sentent plus en sécurité en Afghanistan que ses citoyens »

Le Panjshir, lieu de naissance d’Ahmad Massoud, a été le théâtre de certains des affrontements les plus violents entre les forces du NRF et les talibans en 2021 et 2022. Cependant, depuis début 2023, hormis des attaques de guérilla sporadiques et des opérations de mines terrestres, aucun engagement direct majeur n’a eu lieu.

Historiquement, le Panshir n’est jamais tombé aux mains des Soviétiques ni des talibans lors de leur premier règne, sous la direction d’Ahmad Shah Massoud, père d’Ahmad Massoud. Cependant, il est désormais sous contrôle taliban.

Un rapport du Conseil de sécurité des Nations Unies (CSNU) sur le terrorisme, publié en février 2024, a révélé qu’Al-Qaïda avait établi huit camps d’entraînement à travers l’Afghanistan, dont un dépôt d’armes au Panjshir, soulignant la liberté de mouvement du groupe sous le régime des talibans.

Interrogé sur la situation actuelle au Panshir, Massoud a déclaré :

Les talibans sont venus installer des camps pour quelques jours, comme l’avaient fait les Soviétiques. Et nous avons tous vu ce qui leur est arrivé. Les étrangers et les groupes terroristes se sentent plus en sécurité en Afghanistan que leurs propres citoyens, et c’est là le plus grand exploit des talibans.

Le chef du NRF a souligné que l’alliance des talibans avec des groupes terroristes étrangers ne bénéficie pas du soutien de l’opinion publique. Il a ajouté :

« Quand nous aurons le peuple de notre côté, que ce soit aujourd’hui, demain ou après-demain, nous reprendrons chaque pierre et chaque arbre de notre patrie [des mains des talibans]. »

 

La politique de Trump envers les talibans sera-t-elle différente ?

L’administration Biden a été vivement critiquée pour avoir envoyé chaque semaine 40 millions de dollars en Afghanistan, des fonds qui, selon les Républicains, ont fini entre les mains des talibans. Ces transactions financières ont suscité des débats au Congrès américain.

Avec le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche, ces versements ont été interrompus en raison de la suspension de 90 jours de l’aide étrangère américaine. Cependant, la position de l’administration Trump à l’égard des talibans reste incertaine.

La nomination de Marco Rubio au poste de secrétaire d’État et de Pete Hegseth au poste de secrétaire à la Défense – tous deux auparavant opposés aux talibans – a suscité l’espoir parmi les forces anti-talibans d’une pression accrue sur le régime.

Malgré ces développements, Ahmad Massoud est convaincu que la libération de l’Afghanistan viendra de l’intérieur, et non de forces extérieures. Tout en reconnaissant l’opposition de Trump à l’envoi d’aides financières aux talibans, Massoud a déclaré :

« Alors que les États-Unis réduisent leur aide à l’Ukraine, les chances qu’ils continuent à verser de l’argent aux talibans sont encore plus faibles. »

Il a toutefois également souligné que l’avenir de l’Afghanistan doit être façonné par son propre peuple, et non par des acteurs étrangers :

« Mon expérience personnelle de 37 ans de vie m’a appris que toute nation qui dépend de puissances extérieures finira par être faible et humiliée. »

Il a également souligné que l’unité et la résistance du peuple afghan finiront par attirer le soutien international.

 

Le processus de Vienne et la voie vers un Afghanistan démocratique

Le processus de Vienne pour un Afghanistan démocratique a atteint un stade où il vise à favoriser l’unité et la coordination entre les forces anti-talibans, a déclaré Massoud, ajoutant qu’il s’agissait de l’étape la plus cruciale pour l’avenir de l’Afghanistan.

Il a exhorté les Afghans du monde entier à s’acquitter de leurs responsabilités civiques de toutes les manières possibles pour aider à établir un gouvernement légitime en Afghanistan.

Massoud a expliqué :

« L’Afghanistan a été plongé dans l’instabilité et la souffrance en raison de la rivalité géopolitique entre l’Est et l’Ouest. »

Il a toutefois souligné que les efforts visant à reconstruire l’Afghanistan doivent respecter les intérêts des différents pays tout en veillant à ce que le pays devienne un centre régional de coopération et d’engagement avec le monde, plutôt qu’un refuge pour le terrorisme.

« Nous n’épargnerons aucun effort pour parvenir à un Afghanistan sans terrorisme », a conclu Massoud.

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