Afghanistan : une nation sans travail, une jeunesse sans avenir

En Afghanistan, le mot emploi a perdu son sens. Après des décennies de guerre, de corruption, d’interventions étrangères et d’illusions de reconstruction, le pays s’effondre dans une misère silencieuse. Depuis la prise de pouvoir des Talibans en août 2021, l’économie afghane a reculé de près d’un tiers. Derrière cette statistique brutale, des millions d’êtres humains luttent chaque jour pour survivre, sans ressources, sans travail, sans espoir.

Une économie détruite, un pays au bord du gouffre

Depuis le retour des Talibans au pouvoir en août 2021, l’Afghanistan est plongé dans une crise économique et humanitaire sans précédent. Le pays, déjà fragilisé par des décennies de conflit, a vu son économie s’effondrer, ses habitants basculer dans la pauvreté la plus extrême, et toute perspective de développement s’éloigner inexorablement. Les chiffres sont les témoins impitoyables de cette descente aux enfers.

Une contraction économique drastique

L’économie afghane a subi un choc d’une rare violence après le changement de régime. Selon les estimations officielles, le PIB de l’Afghanistan a connu une contraction brutale de 20,7 % en 2021, et a continué de baisser en 2022. En 2023, bien qu’une légère croissance de 2,7 % ait été rapportée, l’économie afghane était encore près d’un quart plus petite qu’en 2020. Le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) a même déclaré en mars 2024 que l’économie afghane s’était « fondamentalement effondrée », ayant enregistré une contraction cumulée de 27 % depuis la prise de pouvoir des Talibans.

Cette contraction est d’autant plus alarmante que l’Afghanistan était déjà l’un des pays les plus pauvres du monde. Le PIB par habitant est revenu aux niveaux de 2008, avec une baisse estimée à 31 % entre 2021 et 2022.

Une pauvreté généralisée et une aide humanitaire vitale mais insuffisante

Avant même août 2021, la moitié de la population afghane vivait déjà sous le seuil de pauvreté. Ce chiffre a explosé depuis. À l’automne 2021, 70 % de la population n’avait pas les revenus suffisants pour satisfaire ses besoins de base, et environ 80 % ont vu leurs revenus diminuer. Bien que certaines estimations du World Bank’s welfare monitoring survey fassent état d’un retour de la pauvreté monétaire à environ 48,3 % en 2023, d’autres agences de l’ONU, basées sur les seuils de pauvreté alimentaire, estiment que 70 % de la population en 2021 et 85 % en 2022 vivaient sous le seuil de pauvreté.

Aujourd’hui, la situation reste critique : en 2024, on estime que 23,7 millions de personnes – soit plus de la moitié de la population afghane – auront besoin d’une aide humanitaire. Cela inclut 14,2 millions de personnes confrontées à des niveaux élevés d’insécurité alimentaire aiguë en mai 2024. L’aide humanitaire, qui avait initialement augmenté pour atteindre 3,8 milliards de dollars USD en 2022, a cependant fortement diminué, avec seulement 31 % du financement nécessaire pour 2024 sécurisé.

Chômage, inflation et exclusion : Les piliers de la destruction

Le marché du travail a été dévasté. Le taux de chômage, qui était d’environ 11,99 % en 2021, a atteint 14,10 % en 2022 et est estimé à 13,30 % en 2024. Cependant, ces chiffres officiels masquent une réalité bien plus sombre, en particulier pour les femmes. L’interdiction par les Talibans de l’éducation des filles au-delà de la sixième année et des emplois pour les femmes a eu un impact économique dévastateur. Le PNUD estime que le coût économique annuel de l’interdiction de l’emploi des femmes en Afghanistan s’élève à 1 milliard de dollars USD, soit 5 % du PIB.

L’inflation a également été un fléau, atteignant 13,71 % en 2022, bien que le pays ait enregistré une déflation de -6,60 % en 2024, reflétant une demande intérieure atone et un pouvoir d’achat en chute libre.

Par ailleurs, le gel des avoirs de la Banque centrale afghane (environ 9,5 milliards de dollars USD) par les États-Unis, la coupure quasi-totale de l’aide internationale (qui représentait auparavant quelque 8 milliards de dollars USD par an, soit environ 40 % du PIB), et les sanctions ont asphyxié l’économie. Même le succès des Talibans dans l’interdiction de la culture du pavot à opium a eu des conséquences économiques dramatiques pour les ménages ruraux, avec une perte estimée à 1 milliard de dollars USD de revenus par an. Et le nouvel eldorado de la production de méthanphétamines ne profite qu’aux seuls talibans et leur réseau mafieux de narco trafic.

L’Afghanistan est aujourd’hui une économie en ruines, caractérisée par une pauvreté généralisée, un chômage endémique, une exclusion des femmes du marché du travail et une dépendance accrue à l’aide humanitaire. Sans un changement radical des politiques internes et un réengagement significatif de la communauté internationale, la spirale de la misère risque de s’aggraver, menaçant la survie même de millions d’Afghans.

Le cauchemar des travailleurs journaliers : L’Ombre de la Précarité, un Poids Économique Souvent Ignoré

Dans le paysage complexe du marché du travail mondial, une catégorie de travailleurs reste souvent dans l’ombre : les travailleurs journaliers. Ces hommes et ces femmes, qui vivent au rythme des missions ponctuelles et des revenus incertains, incarnent la face la plus vulnérable de l’emploi. Loin des contrats stables et des protections sociales, leur quotidien est une lutte pour la survie, malgré leur contribution significative à l’économie.

Des chiffres qui interpellent : L’ampleur du travail informel

À l’échelle mondiale, le phénomène est colossal. Selon une mise à jour de l’Organisation internationale du travail (OIT) en 2023, basée sur des données de 2019, pas moins de 58 % de l’emploi total dans le monde, soit environ 2 milliards de personnes, relèvent de l’économie informelle. Ce chiffre vertigineux confirme que le travail informel, dont les travailleurs journaliers sont une composante essentielle, demeure la principale source d’emploi sur la planète. En Afrique, par exemple, la proportion est encore plus frappante, avec 84 % de l’ensemble des travailleurs occupant un emploi informel.

La précarité au quotidien : Un défi constant

Au-delà des chiffres, la vie des travailleurs journaliers est marquée par une précarité omniprésente. En France, l’Observatoire des inégalités révèle qu’en 2021, 13,3 % des emplois, soit 3,7 millions de salariés, avaient un statut précaire (CDD, intérim, apprentissage). Cette précarité, qui a doublé en quarante ans, touche particulièrement les jeunes : en 2023, 56 % des salariés de moins de 25 ans occupaient un emploi précaire.

Pour les travailleurs journaliers, cette précarité est exacerbée par l’absence de contrat formel, de sécurité de l’emploi, de congés payés, de protection sociale et souvent de salaire minimum garanti. Ils sont à la merci des fluctuations du marché, des aléas climatiques et de la bonne volonté des employeurs. Leurs conditions de travail sont souvent difficiles, les horaires irréguliers et les tâches pénibles, sans les garanties légales qui s’appliquent aux salariés classiques (par exemple, la durée légale du travail en France est de 35 heures par semaine, avec un maximum de 10 heures par jour et 48 heures sur une semaine).

Une contribution économique sous-estimée

Malgré leur vulnérabilité, les travailleurs journaliers jouent un rôle économique vital. Ils répondent à des besoins ponctuels en main-d’œuvre dans des secteurs variés comme l’agriculture, le bâtiment, la restauration, le nettoyage ou les services à la personne. Leur flexibilité est un atout pour de nombreuses entreprises, en particulier les petites structures ou celles confrontées à des pics d’activité.

Cependant, leur contribution est souvent sous-estimée et leur travail est rarement valorisé à sa juste mesure. L’absence de reconnaissance formelle les maintient dans un cercle vicieux de vulnérabilité, les privant d’accès au crédit, à la formation et à une véritable progression professionnelle.

Un enjeu social et politique majeur

La situation des travailleurs journaliers est un miroir des inégalités croissantes et des défis posés par la flexibilisation du travail. Reconnaître leur existence, comprendre leurs réalités et mettre en place des mécanismes de protection adaptés sont des impératifs sociaux et politiques. Il s’agit non seulement d’améliorer leurs conditions de vie, mais aussi d’intégrer pleinement cette force de travail dans l’économie formelle, pour une croissance plus inclusive et équitable.

Femmes afghanes : L’emploi confisqué des femmes, un recul alarmant

Depuis la prise de pouvoir par les Talibans en août 2021, la situation des femmes afghanes s’est considérablement détériorée, notamment en ce qui concerne leur accès à l’emploi. Les décrets restrictifs se sont multipliés, les excluant progressivement de la vie publique et économique et confisquant leurs droits durement acquis. Les chiffres sont éloquents et témoignent d’une régression sans précédent.

Une participation au marché du travail en chute libre

Avant août 2021, bien que des disparités existaient, les femmes afghanes participaient activement à divers secteurs. En 2020, le taux de participation des femmes à la population active était de 19 %, selon un rapport de l’Organisation internationale du travail (OIT). Ce chiffre était déjà quatre fois inférieur à celui des hommes (81 %), mais il représentait une présence féminine non négligeable.

Avec le retour des Talibans, la situation a basculé. Dès le troisième trimestre de 2021, le taux d’emploi des femmes a chuté à 16,7 %. Les projections indiquaient une baisse d’environ 25 % de l’emploi des femmes au deuxième trimestre de 2022 par rapport au deuxième trimestre de 2021, en l’absence de changements politiques positifs.

Aujourd’hui, les chiffres sont encore plus alarmants. Selon TheGlobalEconomy.com, le taux de participation des femmes à la population active est tombé à 4,83 % en 2023, une diminution par rapport aux 5,15 % enregistrés en 2022. À titre de comparaison, la moyenne mondiale est de 51,07 %. L’Afghanistan présente le deuxième pire écart de genre au monde, avec une disparité de 76 % entre les réalisations des femmes et des hommes en matière de santé, d’éducation, d’inclusion financière et de prise de décision (ONU Femmes, juin 2025).

Des interdictions généralisées et leurs conséquences

Les interdictions imposées par les Talibans sont claires : les femmes sont largement exclues de l’éducation au-delà de la sixième année et de la plupart des professions. Les exceptions sont rares et soumises à de sévères restrictions, principalement dans les secteurs de la santé et de l’éducation, mais même là, la présence féminine diminue.

  • Fonction publique et secteur privé : Les femmes ont été forcées de quitter leurs rôles dans l’administration publique, leur présence dans le secteur privé a été drastiquement réduite, et de nombreuses entreprises dirigées par des femmes ont été fermées.
  • ONG et Nations Unies : En décembre 2022, les Talibans ont interdit aux femmes de travailler pour les ONG nationales et internationales, une restriction étendue aux femmes afghanes employées par l’ONU en avril 2023.
  • Salons de beauté : Même les salons de beauté, source vitale de revenus et d’autonomie pour de nombreuses femmes, ont été contraints de fermer en juillet 2023.

Ces politiques ont des conséquences économiques désastreuses pour l’Afghanistan. Le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) estime que le coût économique annuel de l’interdiction de l’emploi des femmes en Afghanistan s’élève à 1 milliard de dollars USD, soit 5 % du PIB. Une autre projection indique que l’économie afghane pourrait perdre 9,6 milliards de dollars USD d’ici 2066 si l’interdiction d’accès des femmes à l’enseignement supérieur persiste.

Un potentiel inexploité et une augmentation de la pauvreté

L’exclusion systématique des femmes de la société à tous les niveaux entrave non seulement les progrès en matière d’égalité des genres et des Objectifs de développement durable (ODD), mais exacerbe également la pauvreté et l’instabilité de manière plus générale. Les femmes afghanes ne réalisent actuellement que 17 % de leur potentiel, et les politiques actuelles ne feront que perpétuer, voire aggraver, ce potentiel sous-réalisé.

Malgré les contraintes dévastatrices, certaines femmes sont contraintes d’entrer sur le marché du travail informel par pure nécessité, souvent dans des postes moins bien rémunérés et moins sécurisés. Cependant, elles continuent d’assumer l’écrasante majorité du travail domestique non rémunéré.

La communauté internationale continue d’appeler à la fin de ces restrictions et à la restauration des droits des femmes afghanes, soulignant que leur participation est essentielle au développement et à la paix durable du pays. L’Afghanistan, avec sa population féminine privée d’accès à l’emploi et à l’éducation, est en train de gâcher sa plus grande ressource.

Les jeunes : génération sacrifiée

L’Afghanistan, pays meurtri par des décennies de conflits, présente aujourd’hui le visage d’une nation où la jeunesse, majoritaire et pourtant si vulnérable, semble être la principale victime d’une crise humanitaire, économique et sociale sans précédent. Les chiffres ne mentent pas et dépeignent une réalité glaçante pour cette génération sacrifiée.

Une Démographie Jeune face à l’Adversité 

Avec une population estimée à environ 43 millions d’habitants en 2025, l’Afghanistan se caractérise par sa jeunesse. On estime que près de 60% de la population a moins de 25 ans. Cela représente des millions de jeunes filles et de jeunes garçons qui devraient être les architectes de l’avenir de leur pays, mais qui se retrouvent pris au piège d’un système qui leur refuse les opportunités les plus fondamentales.

L’Éducation en Ruines 

Le secteur de l’éducation est sans doute l’un des plus impactés, avec des conséquences désastreuses sur le long terme.

  • Fermeture des écoles et interdiction d’éducation pour les filles : Depuis la prise de pouvoir des Talibans en août 2021, les filles se sont vu interdire l’accès à l’enseignement secondaire et universitaire. Cela prive plus de 1,1 million de filles de leur droit fondamental à l’éducation, brisant leurs rêves et limitant drastiquement leurs perspectives d’avenir.
  • Chute drastique de la scolarisation : Avant 2021, des progrès avaient été faits en matière de scolarisation, notamment pour les filles. Aujourd’hui, les chiffres sont alarmants. Le nombre d’enfants non scolarisés est en augmentation constante, et on estime que près de 3,7 millions d’enfants (majoritairement des filles) ne vont pas à l’école.
  • Manque d’enseignants et d’infrastructures : De nombreuses écoles ont été endommagées ou détruites par les conflits, et un grand nombre d’enseignants ont quitté le pays ou ne sont plus payés, exacerbant la crise éducative.
La Santé des Jeunes en Péril

Les jeunes Afghans font face à des défis sanitaires majeurs, aggravés par la pauvreté et le manque d’accès aux services de santé.

  • Malnutrition sévère : On estime que plus de 3,2 millions d’enfants de moins de cinq ans souffrent de malnutrition aiguë, dont 1 million de formes sévères qui mettent leur vie en danger. Les adolescents et jeunes adultes sont également affectés par l’insécurité alimentaire.
  • Accès limité aux soins : Le système de santé est exsangue, avec une pénurie de médicaments, d’équipements et de personnel qualifié. Des millions de jeunes n’ont pas accès aux soins de base, aux vaccins ou à la santé reproductive.
  • Problèmes de santé mentale : Les traumatismes liés à des années de guerre, à la pauvreté et à l’absence de perspectives ont un impact dévastateur sur la santé mentale des jeunes, avec une augmentation des cas de dépression, d’anxiété et de stress post-traumatique.
Un Avenir Économique Compromis

L’économie afghane est en chute libre, laissant des millions de jeunes sans perspectives d’emploi et les poussant souvent vers des situations désespérées.

  • Taux de chômage élevé : Le chômage des jeunes est endémique, avec des estimations dépassant les 40% dans certaines régions. Même les jeunes diplômés peinent à trouver du travail, les entreprises étant à l’arrêt ou ayant fui le pays.
  • Travail des enfants en hausse : Face à l’extrême pauvreté, de plus en plus de familles sont contraintes d’envoyer leurs enfants travailler, souvent dans des conditions dangereuses et pour des salaires misérables. On estime que des centaines de milliers d’enfants, parfois dès l’âge de 5 ou 6 ans, sont employés.
  • Dépendance à l’aide humanitaire : Plus de 29 millions d’Afghans, soit les deux tiers de la population, dépendent de l’aide humanitaire pour survivre. Cette dépendance est particulièrement marquée chez les jeunes qui n’ont pas d’autres moyens de subsistance.
L’Exode et l’Espoir Bafoué 

Face à cette situation désespérante, des milliers de jeunes Afghans tentent de fuir le pays, risquant leur vie dans l’espoir d’un avenir meilleur. Ce sont des cerveaux et des forces vives qui quittent l’Afghanistan, appauvrissant encore davantage un pays déjà exsangue.

Les chiffres devraient être un cri d’alarme. Ils nous rappellent que la jeunesse afghane, forte de son nombre et de son potentiel, est en train d’être sacrifiée sur l’autel d’un conflit et d’un régime qui l’étouffent. Ignorer cette réalité, c’est condamner un pays tout entier à une pauvreté durable et à une instabilité chronique. Il est impératif que la communauté internationale agisse, non seulement pour répondre à l’urgence humanitaire, mais aussi pour garantir à cette jeunesse afghane son droit fondamental à l’éducation, à la santé et à un avenir digne. C’est le seul chemin vers une paix durable en Afghanistan.

Le choc des retours

L’Afghanistan est confronté à une crise humanitaire majeure en raison des retours forcés et massifs de réfugiés afghans depuis l’Iran et le Pakistan. Des millions d’Afghans, dont beaucoup sont nés et ont vécu toute leur vie dans ces pays voisins, sont contraints de regagner un pays qu’ils ne connaissent pas ou qu’ils avaient fui des décennies auparavant.

Ampleur du phénomène :
  • Depuis 2023, des millions d’Afghans sont rentrés dans leur pays. Pour la seule année 2025, on compte plus de 1,8 million de retours, dont 1,5 million en provenance d’Iran et 300 000 du Pakistan.
  • Les expulsions s’intensifient. En juillet 2025, l’Iran a lancé un ultimatum aux « 4 millions d’Afghans illégaux » pour qu’ils quittent le territoire avant le 6 juillet, entraînant un afflux sans précédent de retours, avec plus de 50 000 personnes franchissant la frontière en une seule journée à Islam Qala.
  • Le Pakistan a également intensifié ses expulsions, avec 100 529 Afghans expulsés depuis le 1er avril 2025.
Les conditions des retours :
  • Des conditions inhumaines : Les personnes qui rentrent sont souvent épuisées, affamées, sans bagages ni argent. Elles ont laissé derrière elles tous leurs biens et se retrouvent sans ressources.
  • Vulnérabilité accrue : Parmi les rapatriés, on trouve de nombreux cas vulnérables : femmes enceintes, personnes âgées, et enfants non accompagnés.
  • Pression et menaces : Beaucoup de réfugiés ont rapporté avoir été forcés de partir sous la contrainte, victimes de harcèlement, d’arrestations arbitraires et de détentions. Des allégations de torture et d’abus graves ont également été signalées par l’ONU.
Conséquences pour l’Afghanistan :
  • Crise humanitaire aggravée : L’arrivée massive de ces populations exerce une pression énorme sur les services de base déjà fragiles de l’Afghanistan (nourriture, eau, abri, soins de santé). Le pays est déjà confronté à des décennies de conflit, à des problèmes économiques, et à des catastrophes naturelles.
  • Insécurité et persécution : Le retour en Afghanistan représente un danger pour de nombreux rapatriés, notamment ceux affiliés à l’ancien gouvernement ou aux forces de sécurité, qui craignent des représailles malgré l’amnistie déclarée par les Talibans. Il existe également un risque de torture et de meurtre pour ceux qui sont perçus comme ayant adopté des valeurs occidentales.
  • Manque de soutien : De nombreux rapatriés n’ont ni travail ni abri, et peinent à se réinsérer dans une société qu’ils ne connaissent pas. Certains sont même contraints de repartir vers la frontière après quelques semaines, ne trouvant aucun soutien.
Appel à l’aide internationale :

Des organisations comme le HCR (Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés), l’OIM (Organisation internationale pour les migrations) et la FICR (Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge) ont lancé des appels urgents pour un soutien international accru afin de répondre aux besoins de ces populations rapatriées. Elles plaident également auprès des gouvernements iranien et pakistanais pour que les retours soient volontaires, sûrs et dignes.

Une urgence humanitaire et politique

Les chiffres sont accablants et témoignent de l’ampleur de la crise : des millions d’Afghans, dont une grande partie n’a jamais vécu dans le pays, sont contraints de revenir. Ces retours massifs et souvent forcés se déroulent dans des conditions déplorables. Beaucoup arrivent sans le sou, affamés, et traumatisés après avoir tout perdu. Les histoires de familles séparées, de personnes âgées et d’enfants non accompagnés sont monnaie courante, soulignant une vulnérabilité extrême.

L’Afghanistan, déjà fragilisé par des décennies de conflit, une économie en ruine, et de fréquentes catastrophes naturelles, est incapable d’absorber cet afflux massif de population. Les infrastructures de base sont insuffisantes, et les ressources en nourriture, eau, abri et soins de santé sont cruellement limitées. Les organisations humanitaires sur le terrain, comme le HCR et l’OIM, sont débordées et lancent des appels urgents à l’aide internationale, mais les besoins dépassent largement les capacités actuelles. La dignité humaine de ces rapatriés est bafouée, et leur survie même est en jeu.

Urgence Politique

Au-delà de la catastrophe humanitaire, cette situation est une bombe à retardement politique.

  • Pression sur les relations régionales : Les expulsions massives de l’Iran et du Pakistan, souvent menées avec peu de considération pour les droits fondamentaux, mettent à rude épreuve les relations avec le régime taliban en Afghanistan et suscitent l’indignation de la communauté internationale. Ces actions sont perçues comme une violation des conventions internationales sur les réfugiés et les droits de l’homme.
  • Instabilité interne en Afghanistan : L’arrivée de ces millions de personnes, sans perspective d’emploi ou de logement, pourrait déstabiliser davantage un pays déjà sous haute tension. La question de leur intégration et de leur survie mettra à l’épreuve la capacité des Talibans à gouverner et à assurer un semblant de stabilité. De plus, la crainte de représailles pour ceux ayant des liens avec l’ancien gouvernement ou des valeurs perçues comme « occidentales » crée un climat de peur et de méfiance.
  • Question de la reconnaissance internationale : Le fait que des pays voisins procèdent à des expulsions à une telle échelle sans réelle coordination ou prise en charge des retours met en lumière le manque de légitimité et de reconnaissance internationale du régime taliban. Cela soulève également des questions sur la responsabilité collective des États pour les réfugiés et les demandeurs d’asile.
  • Menace de déstabilisation à long terme : Si cette situation n’est pas gérée avec des solutions durables, elle pourrait alimenter de nouvelles vagues de migration clandestine vers d’autres pays, créer des foyers de désespoir et potentiellement des poches d’extrémisme, avec des répercussions bien au-delà des frontières de l’Afghanistan.

En somme, le « choc des retours forcés » en Afghanistan est un défi complexe qui exige une réponse coordonnée et urgente de la part de la communauté internationale. Il est impératif de soutenir les efforts humanitaires sur le terrain tout en engageant un dialogue politique constructif pour garantir des retours dignes et des solutions durables pour ces populations vulnérables.

Que pensez-vous des responsabilités des pays d’accueil et de la communauté internationale face à cette crise ?


Ce qui manque : un plan de survie

La communauté internationale continue de financer l’aide humanitaire, mais elle le fait en gardant les yeux fermés sur la racine du mal : un régime qui détruit méthodiquement les capacités de travail, d’apprentissage, d’émancipation, d’organisation collective.

Il faut, d’urgence, penser un plan de survie pour le peuple afghan :

  • Des programmes de formation professionnelle à grande échelle pour les jeunes et les rapatriés ;
  • Des mécanismes de soutien à l’emploi féminin, notamment dans l’économie informelle ;
  • Des appuis aux coopératives rurales et aux activités génératrices de revenus dans les zones reculées ;
  • Et surtout, une pression politique internationale pour garantir un minimum d’espace civique permettant aux Afghanes et aux Afghans de reconstruire leur avenir.

Aujourd’hui, l’Afghanistan est un pays sans travail et sans espoir


Compléments d’information

Rapport sur le Travail et le Manque d’Emploi en Afghanistan

L’Afghanistan est confronté à des niveaux sans précédent de besoins humanitaires, exacerbés par des décennies de conflit, de catastrophes naturelles et de crises économiques. Le marché du travail est particulièrement touché par un chômage généralisé et une faible création d’opportunités d’emploi, ce qui a un impact profond sur la population.

1. Aperçu de la Situation de l’Emploi et du Chômage :

  • Chômage et Sous-emploi Élevés : Le chômage, le sous-emploi, l’endettement des ménages et la pauvreté restent généralisés, touchant près de la moitié de la population. Ces problèmes sont encore plus prononcés pour les femmes et les ménages dirigés par des femmes. (Source : Afghanistan Humanitarian Needs and Response Plan 2025 Summary – OCHA, [Afghanistan Humanitarian Needs and Response Plan 2025 (December 2024) EN/PS/Dari])

  • Contraction Économique : L’économie afghane s’est contractée de près d’un tiers après août 2021. L’isolement financier et la réduction drastique du financement du développement entravent la reprise économique et limitent la capacité des autorités de facto à fournir des services de base et à garantir des moyens de subsistance. (Source : [Afghanistan Humanitarian Needs and Response Plan 2025 (December 2024) EN/PS/Dari])

  • Pauvreté et Dette des Ménages : Les niveaux élevés de chômage et l’inflation des prix des produits de base ont entraîné une augmentation de l’endettement moyen des ménages, défiant les mécanismes d’adaptation des populations et entravant la capacité de l’économie déjà fragile à s’adapter aux chocs. Selon le rapport Socio-Economic Outlook 2023 du PNUD, plus de 85 % de la population vit désormais sous le seuil de pauvreté. (Source : Afghanistan 2023 IFRC network annual report, Jan-Dec (9 August 2024) – ReliefWeb)

  • Impact sur les Travailleurs Journaliers : Les sanctions économiques et le retrait des organisations d’aide au développement après août 2021 ont rendu particulièrement difficile pour les travailleurs journaliers de trouver du travail dans les grandes villes d’Afghanistan, où les opportunités ont considérablement diminué. (Source : Afghanistan: Unemployment worsens humanitarian crisis, people with disability among worst affected – ReliefWeb)

  • Chômage des Femmes : La participation des femmes à la population active est faible et leur taux de chômage est extrêmement élevé. Les mesures restrictives imposées par les autorités de facto ont également réduit l’accès des femmes à l’éducation et aux opportunités d’emploi. (Source : 5.5.1. General situation – EUAA, Afghanistan 2023 IFRC network annual report, Jan-Dec (9 August 2024) – ReliefWeb)

2. Données Spécifiques de l’UNOCHA :

  • Besoin Humanitaire : En 2025, 22,9 millions de personnes auront besoin d’une assistance humanitaire en Afghanistan. Cela inclut 21 millions de personnes qui n’ont pas accès à l’eau et à l’assainissement, 14,8 millions de personnes confrontées à une insécurité alimentaire aiguë et 14,3 millions de personnes ayant un accès limité aux soins de santé. (Source : Afghanistan Humanitarian Needs and Response Plan 2025 Summary – OCHA, [Afghanistan Humanitarian Needs and Response Plan 2025 (December 2024) EN/PS/Dari])

  • Accès aux Services de Base : En 2019, selon l’UNOCHA, seulement 67 % de la population avait accès à au moins des services d’eau potable de base, avec de grandes disparités entre les zones urbaines (96 %) et rurales (57 %). Seuls 43 % de la population avait accès à des installations d’assainissement de base. (Source : 5.5.1. General situation – EUAA)

  • Incidents d’Accès Humanitaire : L’UNOCHA a signalé une augmentation de 30 % des incidents d’accès humanitaire en Afghanistan en janvier 2024 par rapport à décembre 2023. En janvier, l’agence a enregistré 137 incidents, dont 22 concernaient des limitations de la participation des femmes. (Source : UN’s OCHA reports surge in humanitarian access issues in Afghanistan – Amu TV)

3. Impact des Retours de Réfugiés :

  • Pression sur les Ressources : Les retours massifs d’Afghans, en particulier du Pakistan et de l’Iran, mettent une pression supplémentaire sur des services de base déjà débordés et des ressources locales dans les communautés d’accueil. On prévoit que plus de 1,46 million d’Afghans du Pakistan et d’Iran retourneront en 2024. (Source : [Afghanistan Humanitarian Needs and Response Plan 2024 (December 2023) EN/Dari/PS], [Afghanistan Humanitarian Needs and Response Plan 2025 (December 2024) EN/PS/Dari])

  • Absence d’Emploi pour les Rapatriés : Presque la moitié des familles rapatriées en Afghanistan depuis le Pakistan ont déclaré qu’il n’y avait pas d’emplois disponibles pour elles, selon une enquête de Save the Children en 2024. 81 % des personnes interrogées ont ajouté qu’elles n’avaient aucune compétence pouvant mener à un emploi.


L’agriculture

Analyse Approfondie des Performances Agricoles en Afghanistan

Ce rapport présente une analyse détaillée de la performance agricole en Afghanistan. L’agriculture, pilier de l’économie et des moyens de subsistance, est confrontée à une insécurité alimentaire aiguë exacerbée par la sécheresse, les conflits et les inondations, malgré des prévisions de croissance pour la production de blé et des interventions humanitaires significatives. Ces observations soulignent l’urgence d’adopter des stratégies intégrées et fondées sur des données pour renforcer la résilience et garantir la sécurité alimentaire.

1. Introduction

La compréhension de la performance agricole et des menaces liées au climat est fondamentale pour l’élaboration de politiques éclairées et la planification stratégique. Ce rapport vise à fournir une analyse détaillée et quantitative des dynamiques agricoles en Afghanistan. La structure du rapport est conçue pour guider le lecteur à travers ces thématiques, en présentant des données chiffrées, des analyses contextuelles et des implications plus larges.

2. Rendement Agricole et Sécurité Alimentaire en Afghanistan

Cette section examine l’état critique de l’agriculture en Afghanistan, son rôle central dans la sécurité alimentaire, les défis persistants et les interventions humanitaires en cours.

2.1 Contexte et dépendance à l’agriculture


L’agriculture constitue l’épine dorsale des moyens de subsistance afghans et est essentielle à l’économie du pays. Environ 70 % des Afghans vivent en milieu rural, et le secteur agricole représente au moins 25 % du PIB national. L’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) estime que 80 % de tous les moyens de subsistance dépendent directement ou indirectement de l’agriculture.1 Cette dépendance écrasante rend la population afghane extrêmement vulnérable aux chocs agricoles, qui se traduisent directement par une insécurité alimentaire généralisée et une crise humanitaire sévère.

Infographie : La Crise Agricole en Afghanistan

Le Carrefour Agricole de l’Afghanistan

Une analyse visuelle de la dépendance, des crises et de la résilience d’un secteur vital pour la survie de la nation.

80%

des moyens de subsistance

dépendent de l’agriculture.

70%

de la population

vit en zone rurale.

25%

du PIB national

provient du secteur agricole.

La Faim : Une Crise Persistante

Malgré une légère amélioration depuis 2021, l’insécurité alimentaire aiguë reste à un niveau critique en 2024, menaçant des millions de vies et soulignant une vulnérabilité systémique profonde.

Niveaux d’Urgence

3,1 M

de personnes

sont confrontées à des niveaux d’urgence de la faim en 2024, le stade juste avant la famine.

Le Blé : Une Lueur d’Espoir Fragile

Le blé est une culture stratégique. Les prévisions de production pour 2024/25 sont optimistes, mais restent menacées par les inondations et les défis logistiques historiques qui entravent la distribution.

Croissance Attendue

+13%

de croissance

de la production de blé est prévue pour 2024, un signe positif malgré les risques ambiants.

Aide Humanitaire : Un Soutien Vital

Les organisations comme la FAO et le PAM déploient des efforts massifs. La FAO a distribué des kits de culture de blé à 1,3 million de personnes dans 31 des 34 provinces.

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x 1,3 Million

Personnes soutenues par les kits de blé de la FAO

Le Déficit de Financement

Malgré l’aide, les ressources sont insuffisantes. En 2024, le PAM n’a pu couvrir que 41% des besoins pour son intervention hivernale, laissant un vide immense.

De la Crise à la Résilience : Le Chemin à Suivre

1. Crises Multiples

Sécheresse, inondations et conflits créent une insécurité alimentaire aiguë.

2. Aide d’Urgence

L’aide humanitaire (nourriture, semences) est une bouée de sauvetage essentielle mais insuffisante.

3. Investissement Durable

La construction d’infrastructures résilientes (ex: murs anti-inondation) est cruciale pour l’avenir.

Cette infographie est basée sur le « Rapport détaillé sur l’agriculture afghane ». Données fournies par la FAO, le PAM et l’USDA.

Visualisation créée en 2024. Ni Mermaid JS ni SVG n’ont été utilisés dans la création de cette page.

En 2021, près de 19 millions de personnes en Afghanistan étaient confrontées à une insécurité alimentaire aiguë, incapable de se nourrir quotidiennement, un chiffre qui devait atteindre près de 23 millions à la fin de cette même année.1 Bien qu’une amélioration ait été observée en 2024, avec 14,8 millions d’Afghans en situation d’insécurité alimentaire aiguë et 3,1 millions d’entre eux confrontés à des niveaux d’urgence de la faim 2, le nombre élevé de personnes affectées souligne une vulnérabilité persistante et critique. La FAO prévoyait une période de soudure « rude » avant la récolte, insistant sur l’urgence d’intensifier les efforts pour nourrir les familles rurales et assurer leur survie, notamment en protégeant leur bétail.1

Des témoignages d’agriculteurs, comme celui d’Helalading Najmadin, illustrent la gravité de la situation : « la sécheresse, la Covid-19 et le conflit armé nous ont amenés à cette terrible situation. Dans notre village, les gens n’ont même pas de pain à manger ».1 Il a également rapporté la destruction de biens et de bétail, ainsi que l’incapacité de récolter le blé en raison du manque de semences améliorées, d’engrais et d’eau. La perspective d’une deuxième année consécutive de sécheresse en 2022 a fait planer le « risque très réel de famine » sans une aide immédiate et à grande échelle.1 Le désespoir a conduit au déplacement des populations rurales, les agriculteurs abandonnant leurs terres faute de nourriture, de récoltes passées, de semences et de bétail.1 Malgré l’accès humanitaire, les prix ont grimpé en flèche et les besoins ont continué de dépasser les ressources disponibles. Les agriculteurs ont perdu la quasi-totalité de leurs récoltes, ont été contraints de vendre leur bétail, ont accumulé des dettes massives et se sont retrouvés sans argent.1

Cette situation met en évidence une vulnérabilité extrême de la population afghane aux chocs agricoles. La forte dépendance économique et sociale à l’agriculture signifie que toute perturbation de ce secteur se traduit directement par une insécurité alimentaire généralisée. La légère amélioration des chiffres de l’insécurité alimentaire entre 2021 et 2024, bien que positive, ne doit pas masquer la fragilité sous-jacente. L’économie et la structure sociale de l’Afghanistan sont intrinsèquement liées à sa production agricole, créant une vulnérabilité systémique où les chocs climatiques (sécheresse, inondations), les conflits et les maladies ne se contentent pas d’affecter un secteur, mais déstabilisent l’ensemble du système alimentaire du pays et la survie même de ses citoyens.

La combinaison des sécheresses récurrentes, des conflits persistants et des impacts de la COVID-19 a créé une crise complexe et aggravante. Ces facteurs agissent en synergie, entraînant la destruction généralisée des actifs agricoles, le manque d’intrants essentiels, la flambée des prix et les déplacements forcés, piégeant les communautés agricoles dans un cycle d’endettement et de désespoir. Le témoignage des agriculteurs illustre clairement cette interaction destructrice, où le manque d’intrants de base est une conséquence directe de ces stress combinés. La vente forcée de bétail et l’accumulation de dettes représentent une érosion du capital, rendant le rétablissement futur encore plus difficile et conduisant à un appauvrissement chronique.

2.2 Production et prévisions de blé

Le blé est une culture stratégique en Afghanistan en raison de son taux de consommation élevé.3 Les chiffres de production de blé pour l’Afghanistan révèlent une situation fluctuante. La moyenne quinquennale de 2020 à 2024 s’établit à 4 675 milliers de tonnes. Les prévisions pour 2024/25 sont de 5 200 milliers de tonnes, tandis que celles pour 2025/26 sont légèrement inférieures, à 4 800 milliers de tonnes. Cela représente une augmentation de 3 % pour 2025-26 par rapport à la moyenne quinquennale.5 L’Afghanistan prévoit une croissance de 13 % de sa production de blé pour 2024.6

Cependant, cette perspective positive est tempérée par la réalité des défis sur le terrain. Certains agriculteurs ont été confrontés à des difficultés en raison des inondations qui ont endommagé les champs de blé dans certaines provinces.6 Historiquement, même en 1998, lorsque la production céréalière était la plus importante depuis 1978, les routes d’approvisionnement bloquées ont empêché les excédents du nord d’atteindre les zones densément peuplées comme Kaboul. Les besoins nationaux en importation de céréales pour 1998/99 étaient alors estimés à 740 000 tonnes.7

Ces données mettent en évidence une reprise fragile et une vulnérabilité persistante de la production de blé en Afghanistan. Bien que les prévisions pour 2024/25 soient encourageantes, dépassant la moyenne récente, la situation reste précaire en raison de la menace continue des inondations et des problèmes historiques de chaîne d’approvisionnement. Les gains potentiels sont constamment menacés par la variabilité climatique et les défis logistiques. L’exemple de 1998 démontre que même une production élevée ne garantit pas la sécurité alimentaire si les voies de distribution sont compromises. Ce contexte indique que le secteur agricole afghan, en particulier la production de blé, est sur le fil du rasoir. La capacité du pays à traduire la production en disponibilité alimentaire réelle dépend fortement d’un environnement stable et de réseaux de distribution efficaces.

Tableau 2.1: Production de Blé en Afghanistan (Moyenne 2020-2024, Prévisions 2024/25 et 2025/26 en milliers de tonnes)

PériodeProduction (milliers de tonnes)% de variation par rapport à la moyenne 2020-2024
Moyenne 2020-20244 675
Prévision 2024/255 200+11,2 %
Prévision 2025/264 800+3 %
Source: USDA 5

2.3 Interventions humanitaires et campagnes agricoles

Face à cette situation précaire, les organisations internationales telles que la FAO et le Programme Alimentaire Mondial (PAM) déploient des efforts considérables pour soutenir le secteur agricole afghan et répondre à l’insécurité alimentaire. La FAO a urgemment demandé 115 millions de dollars pour l’hiver et le printemps 2022, ainsi que 85 millions de dollars supplémentaires pour la réponse humanitaire en 2022, afin de prévenir l’effondrement des moyens de subsistance et les déplacements de population.1

La FAO fournit une aide vitale en distribuant des kits de culture de blé d’hiver dans 31 des 34 provinces afghanes. Ces kits comprennent des semences certifiées de haute qualité et une formation technique, permettant à 1,3 million de personnes de maintenir leurs moyens de subsistance.3 Un programme coûtant 157 dollars permet à une famille de couvrir ses besoins en céréales pendant un an, un montant nettement inférieur aux 1 080 dollars nécessaires pour les besoins alimentaires minimaux d’une famille moyenne.1 La FAO soutient également le bétail, visant à nourrir et à maintenir la productivité de jusqu’à 8,4 millions de têtes de bétail, contribuant ainsi à la production laitière et aux revenus.1

Le PAM a touché 18,6 millions de personnes en 2023, dont 80 % de femmes et d’enfants.8 En 2024, le PAM a assisté 11,8 millions de personnes, incluant 6,5 millions de femmes et de filles, en fournissant 318 000 tonnes métriques et 148,6 millions de dollars d’aide alimentaire d’urgence, de soutien nutritionnel et de moyens de subsistance.2 Le programme a soutenu 6,4 millions de personnes pendant la période de soudure hivernale (janvier-avril 2024) et environ 1,2 million de personnes par mois de mai à octobre 2024 dans les zones les plus critiques après la récolte.2

Malgré ces efforts considérables, les besoins ont dépassé les ressources disponibles. Le PAM n’a pu couvrir que 12 % des besoins pendant la réponse estivale dans les zones critiques et 41 % pendant la phase d’intensification hivernale en 2024.2 Ce décalage important entre l’aide fournie et l’ampleur des besoins souligne un déficit persistant et grave en ressources. Les organisations humanitaires, bien qu’essentielles à la survie de millions de personnes, agissent principalement comme des palliatifs plutôt que comme des solutions complètes. Le PAM a également mis en œuvre des activités de renforcement de la résilience, notamment la construction de murs de protection contre les inondations qui ont protégé des milliers d’hectares de terres, de maisons et de bétail des crues soudaines.2 Cette initiative, ainsi que les campagnes de semences certifiées de la FAO, illustrent l’importance de passer d’une aide d’urgence à des interventions de développement à plus long terme pour s’attaquer aux causes profondes de l’insécurité alimentaire et réduire la dépendance future à l’aide d’urgence.

3. Conclusion

L’analyse des performances agricoles en Afghanistan révèle des défis interconnectés et complexes. L’extrême dépendance à l’agriculture rend la population particulièrement vulnérable aux chocs climatiques et aux conflits. Malgré des prévisions de croissance pour la production de blé en 2024/25, la situation reste précaire en raison des menaces d’inondations et des défis logistiques. Les efforts humanitaires, bien que massifs, ne parviennent pas à combler l’écart colossal entre les besoins et les ressources disponibles, soulignant l’urgence d’un financement accru et d’investissements à long terme dans la résilience agricole.

En synthèse, ces observations convergent vers une conclusion impérative : la résilience face aux défis socio-économiques et climatiques exige une approche intégrée. La sécurité alimentaire mondiale, la stabilité économique des nations et la protection des moyens de subsistance des populations dépendent de la capacité à anticiper, s’adapter et atténuer les impacts des phénomènes extrêmes. Des investissements massifs dans les infrastructures résilientes, les systèmes d’alerte précoce, l’agriculture climato-intelligente et la diversification des économies locales sont essentiels. Une collaboration internationale renforcée et un engagement financier soutenu sont indispensables pour construire un avenir plus sûr et plus résilient face aux pressions combinées du changement climatique et des dynamiques socio-économiques mondiales.

Sources des citations

  1. Afghanistan : une aide agricole de toute urgence est nécessaire …, consulté le juillet 25, 2025, https://news.un.org/fr/story/2021/11/1109022
  2. Afghanistan – Annual Country Report | World Food Programme, consulté le juillet 25, 2025, https://www.wfp.org/operations/annual-country-report?operation_id=AF01&year=2024
  3. Professions et secteurs d’activité − Emploi, chômage, revenus du travail – Insee, consulté le juillet 25, 2025, https://www.insee.fr/fr/statistiques/6453692?sommaire=6453776
  4. AFGHANISTAN 2023 Wheat cultivation. – FAO Digital Media Hub, consulté le juillet 25, 2025, https://digital-media.fao.org/archive/AFGHANISTAN-2023-Wheat-cultivation–2A6XC5UGZUQN.html
  5. Afghanistan Production, consulté le juillet 25, 2025, https://ipad.fas.usda.gov/countrysummary/Default.aspx?id=AF
  6. Afghanistan forecasts 13% growth in wheat production for 2024 – Daryo.uz, consulté le juillet 25, 2025, https://daryo.uz/en/2024/06/15/afghanistan-forecasts-13-growth-in-wheat-production-for-2024
  7. FAO/WFP crop and food supply assessment mission to Afghanistan – ReliefWeb, consulté le juillet 25, 2025, https://reliefweb.int/report/afghanistan/faowfp-crop-and-food-supply-assessment-mission-afghanistan

Annual Country Report | World Food Programme, consulté le juillet 25, 2025, https://fr.wfp.org/operations/annual-country-report?operation_id=AF01&year=2023



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