Le triangle de la honte : Talibans, Iran, Pakistan contre le peuple afghan

Masses en errance : l’Afghanistan piégé entre l’exil et la violence

Alors que le régime taliban plonge l’Afghanistan dans un désastre humanitaire et politique, ses voisins immédiats — l’Iran et le Pakistan — ferment progressivement la porte aux millions d’Afghans qui cherchent à fuir un pays devenu invivable. Les deux articles examinés révèlent une convergence tragique : l’exil, dernier recours pour des millions de familles, est désormais criminalisé à la frontière, tandis que la communauté internationale assiste, impuissante, à un drame qui s’enracine.

Des appels à l’Iran pour stopper la brutalité des expulsions

Le premier article d’Afintl.com rapporte l’alerte lancée par deux forces d’opposition afghanes majeures, le Front National de Résistance (NRF) et le parti Jamiat-e-Islami. Ces organisations dénoncent l’intensification des expulsions par Téhéran et appellent à la « patience et à la tolérance » envers les réfugiés afghans. Le NRF insiste sur le caractère existentiel de ces migrations : quitter l’Afghanistan n’est pas un choix mais une nécessité face à la violence, la pauvreté et l’absence de perspectives sous le joug taliban. Le Jamiat-e-Islami, quant à lui, replace la crise dans un contexte politique, pointant la « non-légitimité » des autorités de Kaboul et la déliquescence économique qui pousse les populations à l’exil.

Ces prises de position sont remarquables pour deux raisons : elles révèlent la gravité de la situation, mais elles soulignent aussi le vide sidéral de toute solution interne. Les oppositions afghanes, incapables d’influer sur le cours des événements à Kaboul, se limitent à supplier des pays tiers de ne pas aggraver le sort de leurs compatriotes.

Un Pakistan en mode expulsion de masse, malgré les protestations internationales

Le second article de KabulNow se concentre sur la politique de plus en plus coercitive du Pakistan. Amnesty International alerte sur l’expiration des Proof of Registration (PoR) cards — ces documents temporaires qui confèrent un statut légal à près de 1,4 million d’Afghans — et sur le risque imminent de rafles, de détentions arbitraires et d’expulsions massives. Depuis octobre 2023, plus de 1,3 million d’Afghans ont déjà été forcés de quitter le Pakistan. L’organisation dénonce des violations manifestes du droit international, mais Islamabad persiste : la logique sécuritaire l’emporte sur toute considération humanitaire.

Le parallèle avec l’Iran est frappant : dans les deux pays, le même scénario se reproduit. Dans le silence quasi total de la communauté internationale, Téhéran et Islamabad utilisent la menace d’expulsion comme outil de gestion d’un problème qu’ils estiment ne pas leur appartenir.

L’Afghanistan otage de ses voisins et d’un système international défaillant

Ces expulsions massives ne sont pas de simples événements administratifs. Elles signifient, pour les réfugiés, le retour forcé vers un pays où ils risquent l’extorsion, l’arrestation, voire la mort. Pour l’Afghanistan, elles accentuent la crise : plus de 230 000 Afghans ont déjà été expulsés d’Iran pour le seul mois de juin 2025, avec un pic dans la dernière semaine. Ces mouvements de population massifs exacerbent la misère et la violence, saturent les rares structures d’accueil aux frontières, et alimentent un cycle de désespoir que personne ne semble vouloir briser.

La responsabilité internationale aux abonnés absents

Les discours des oppositions afghanes, comme les alertes d’Amnesty International, pointent la même faillite : celle du système international censé protéger les populations en danger. Alors que l’ONU multiplie les réunions et que les grandes puissances discutent d’accords commerciaux avec les Talibans, aucune initiative crédible n’émerge pour alléger la détresse des réfugiés afghans. Ni en termes de pression diplomatique sur l’Iran et le Pakistan, ni pour ouvrir de nouvelles voies de réinstallation légale.

En renvoyant les réfugiés vers l’Afghanistan, les gouvernements iraniens et pakistanais bafouent leurs obligations internationales, mais aussi la morale la plus élémentaire. Ils condamnent des millions d’êtres humains à errer ou mourir, tandis que les Talibans, eux, profitent de l’indifférence pour consolider un pouvoir fondé sur la peur.

Un exode sans horizon

En conclusion, ces deux rapports rappellent brutalement une vérité qu’on préfère souvent ignorer : pour des millions d’Afghans, la vie ne tient plus qu’à un fil au-delà de leur frontière. Entre la violence talibane et le rejet des voisins, ils sont les otages d’une géopolitique qui les écrase. Tant que la communauté internationale n’osera pas affronter la cause profonde — le maintien au pouvoir des Talibans —, ces vagues d’exil, d’expulsion et de désespoir se répéteront, sans que personne n’en assume la responsabilité.


🔗 Article sur l’appel du NRF et de Jamiat-e-Islami à l’Iran :
Anti-Taliban Groups Urge Iran To Treat Afghan Refugees With Tolerance (afintl.com)

🔗 Article sur Amnesty International et les expulsions au Pakistan :
Rights Group Urges Pakistan to Extend Afghan Refugee Cards, Stop Deportations (kabulnow.com)

🔗 Informations générales sur la situation des réfugiés afghans en Iran et Pakistan (rapport UNHCR) :
UNHCR Afghanistan Situation – Regional Refugee Response Plan

🔗 Derniers chiffres des retours forcés et expulsions depuis l’Iran (OIM) :
IOM Afghanistan Returns Dashboard



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