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Massacres ethniques commis par les talibans depuis 1998 – 1ère partie

Chronologie des massacres ethniques des Talibans

Chronologie des massacres ethniques et violences ciblées par les Talibans (1998-Présent)

Cette chronologie met en évidence les principaux incidents et périodes de violence documentés, principalement contre la communauté Hazara et d’autres minorités en Afghanistan.

Août 1998

Massacre de Mazar-e-Sharif

Après la prise de la ville, les Talibans ont ciblé systématiquement les Hazaras, les Tadjiks et les Ouzbeks. Estimations : 2 000 – 5 000 civils tués. Cet événement est considéré comme un point pivot dans la violence ethnique.

Septembre – Novembre 1998

Massacres à Bamiyan et Zabol

À Bamiyan, environ 500 personnes (dont 200 civils) ont été tuées après la prise de la ville. Dans la province de Zabol, 300 civils (y compris des femmes et des enfants) ont été assassinés par un sous-gouverneur taliban.

Juillet – Septembre 1999

Violences dans les Plaines de Shomaili et Bamiyan

Offensive talibane marquée par des exécutions sommaires, enlèvements, destruction de biens et politique de la terre brûlée. À Bamiyan, des centaines d’hommes, femmes et enfants ont été tués lors de la reprise de la ville.

Mai 2000 – Janvier 2001

Massacres de Yakaolang et Col de Robatak

À Yakaolang, des centaines de civils (principalement Hazaras) ont été systématiquement tués après la reprise de la ville en mai 2000. En janvier 2001, 300 hommes civils Hazaras ont été exécutés sur quatre jours. 26 civils Hazaras ont été retrouvés massacrés au Col de Robatak en mai 2000.

2001 – 2021

Période d’insurrection : Continuité des violations

Bien que moins de massacres à grande échelle, les Talibans ont continué les attaques contre les civils, les exécutions extrajudiciaires (ex: Sohail Pardis, Banu Negar), les destructions de biens et les déplacements forcés. Les Hazaras restent une cible vulnérable, avec l’émergence de l’IS-KP ciblant également la communauté chiite.

Août 2021 – Présent

Second régime taliban : Persistance du ciblage ethnique

Malgré les promesses, les Talibans continuent de cibler les Hazaras (attaques contre écoles et lieux de culte comme la Kaaj Academy, déplacements forcés). L’IS-KP intensifie également ses attaques contre les Hazaras. Les Talibans échouent à protéger cette minorité et perpétuent la discrimination institutionnelle et les abus.

Août 2021 – Présent

Violences et discriminations systémiques

Le second régime taliban est caractérisé par des exécutions extrajudiciaires (218 cas), des disparitions forcées (14 cas), la torture, la répression des femmes et des filles (« apartheid de genre »), la censure des médias et une crise humanitaire généralisée. Ces violences affectent diverses populations vulnérables.

Rapport sur les massacres ethniques commis par les Talibans depuis 1998

 

Le présent rapport documente les massacres ethniques et les violences ciblées perpétrés par les Talibans en Afghanistan depuis 1998. L’analyse révèle un schéma persistant et systématique d’atrocités, principalement dirigées contre la communauté Hazara, mais affectant également d’autres minorités ethniques et religieuses. La violence est profondément enracinée dans l’idéologie ethno-religieuse des Talibans, qui perçoivent les Hazaras chiites comme des « infidèles et des traîtres ».1

La première période de contrôle des Talibans (1998-2001) a été marquée par des massacres à grande échelle, dont le plus notable est celui de Mazar-e-Sharif en août 1998, où des milliers de civils, majoritairement Hazaras, ont été tués.4 Des incidents similaires ont été documentés à Bamiyan, Yakaolang et dans d’autres provinces.4 Après la reprise du pouvoir par les Talibans en août 2021, la nature des menaces a évolué, avec une recrudescence des violences ciblées, des déplacements forcés et une répression généralisée des droits humains. La situation est désormais complexifiée par l’émergence de l’État islamique du Khorasan (IS-KP), qui cible également les Hazaras, tandis que les Talibans, en tant qu’autorité de facto, n’assurent pas leur protection.3 Un manque chronique de responsabilité pour ces crimes a créé un climat d’impunité, perpétuant le cycle de la violence.

I. Introduction : Contextualisation du régime taliban et des dynamiques ethniques en Afghanistan

L’Afghanistan est une nation caractérisée par une mosaïque complexe de groupes ethniques et religieux, dont les interactions ont souvent été marquées par des tensions historiques. Comprendre ces dynamiques est essentiel pour analyser les violences perpétrées par les Talibans depuis 1998.

A. Bref aperçu historique de l’émergence et du contrôle des Talibans

Le mouvement des Talibans a émergé en 1994, prenant rapidement de l’ampleur dans le sud de l’Afghanistan. En 1996, ils ont capturé Kaboul et ont instauré un régime caractérisé par une application rigoureuse et souvent brutale de leur interprétation de la loi islamique.5 En 1998, les Talibans contrôlaient environ 85 % du territoire afghan.4 Leur premier régime s’est achevé en décembre 2001 avec la chute de Kandahar, leur bastion spirituel, suite à l’intervention militaire internationale.9 Après près de deux décennies d’insurrection, les Talibans ont regagné le contrôle de l’Afghanistan en août 2021, suite au retrait des forces étrangères.8

L’idéologie des Talibans est ancrée dans une interprétation ultraconservatrice de l’Islam, souvent décrite comme wahhabite.2 Leurs membres sont majoritairement d’origine ethnique pachtoune et de confession sunnite.2 Cette composition ethnique et religieuse est un facteur déterminant dans la nature des violences qu’ils ont perpétrées.

B. Principaux groupes ethniques et religieux en Afghanistan et tensions historiques

La population afghane est composée de plusieurs groupes ethniques majeurs, dont les Pachtounes, qui constituent le groupe le plus nombreux.10 Parmi les minorités significatives figurent les Tadjiks, les Ouzbeks et les Hazaras.4 Les Hazaras se distinguent particulièrement par leur identité ethno-religieuse unique ; ils sont majoritairement chiites et possèdent des traits physiques distinctifs d’origine asiatique.1

L’histoire des Hazaras est marquée par des siècles de discrimination et de persécution. Au cours des années 1890, une campagne génocidaire menée par l’Émirat d’Afghanistan a entraîné le massacre d’environ 60 % de la population Hazara.1 Ceux qui ont survécu ont été dépossédés de leurs terres, déplacés et même vendus comme esclaves.1 L’oppression a persisté tout au long du XXe siècle, avec des restrictions sur l’accès à l’éducation et aux droits politiques.1 Cette longue histoire de persécution met en lumière que les actions des Talibans ne sont pas des incidents isolés, mais plutôt une continuation de discriminations et de violences ethno-religieuses profondément enracinées en Afghanistan. La violence exercée par les Talibans contre les Hazaras est systémique, enracinée dans des préjugés historiques et sectaires. Les Talibans, en tant que groupe majoritairement pachtoune et sunnite, ont toujours manifesté une hostilité marquée envers les Hazaras, les qualifiant souvent d’ »infidèles et de traîtres ».1 Cette animosité ethno-religieuse constitue un moteur fondamental des violences ciblées documentées. La compréhension de cette continuité historique est cruciale pour saisir la vulnérabilité persistante de la communauté Hazara et les défis à une paix durable en Afghanistan, car les racines du conflit s’étendent bien au-delà du paysage politique immédiat.

II. La première période du régime taliban (1998-2001) : Massacres ethniques et violences ciblées documentés

La première période de contrôle des Talibans sur l’Afghanistan a été caractérisée par une série d’atrocités de grande envergure, dont plusieurs massacres ethniques qui ont marqué l’histoire récente du pays.

A. Le massacre de Mazar-e-Sharif (août 1998) : Un événement pivot

Le massacre de Mazar-e-Sharif, survenu en août 1998 après la capture de la ville par les Talibans, représente l’un des pires exemples de tueries de civils dans le conflit afghan.4 Les groupes principalement ciblés étaient les Hazaras, majoritairement chiites, mais aussi, dans une moindre mesure, les Tadjiks et les Ouzbeks.1 Des rapports crédibles indiquent que les Talibans ont systématiquement fouillé la ville à la recherche d’hommes et de garçons Hazaras, dont beaucoup ont été battus, tués sur place ou arrêtés.4 Les estimations des victimes varient, mais des organisations comme Human Rights Watch et le Rapporteur spécial des Nations Unies ont estimé que le nombre de morts se situait entre 2 000 et 5 000 personnes.4 Il est important de noter qu’un massacre de 70 civils Hazaras, y compris des enfants, avait déjà été rapporté par Amnesty International à Qezelabad, près de Mazar-e-Sharif, en septembre 1997, un an avant la prise de la ville.4

La motivation derrière ce massacre était explicitement liée à la vengeance pour la mort de soldats talibans tués à Mazar-e-Sharif l’année précédente.1 Le nouveau gouverneur taliban de la ville a prononcé des discours anti-chiites et anti-Hazaras, menaçant de violence la communauté.4 Cependant, l’ampleur des tueries et le ciblage systématique de groupes ethniques spécifiques, bien au-delà d’une réponse proportionnée à un incident militaire, indiquent que ce récit de « vengeance » a servi de prétexte commode pour les Talibans afin de mettre en œuvre un programme d’épuration ethnique préexistant. Cela leur a permis de justifier des atrocités généralisées contre des populations civiles qu’ils considéraient déjà comme des « infidèles et des traîtres ».1 Cette utilisation calculée de griefs perçus pour légitimer et intensifier la violence contre des groupes ethniques ciblés révèle une dimension stratégique dans leurs campagnes d’épuration ethnique. L’absence d’observateurs étrangers et de presse dans la ville à l’époque, ainsi que l’obstruction des Talibans aux enquêtes indépendantes, ont entravé l’établissement complet des responsabilités.4

 

B. Massacres à Bamiyan, Yakaolang et dans d’autres régions (1999-2001)

Au-delà de Mazar-e-Sharif, d’autres massacres ethniques ont été documentés pendant cette période :

  • Bamiyan (1999) : Lors de la reprise de Bamiyan en 1999, des exécutions sommaires ont été signalées. Amnesty International a rapporté que des centaines d’hommes, et dans certains cas des femmes et des enfants, ont été séparés de leurs familles, emmenés et tués.5 En septembre 1998, lors de la prise de la ville, environ 500 personnes, dont 200 civils, auraient été tuées.4 Un massacre de 45 civils dans un village près de Bamiyan a également été rapporté en septembre 1998.4
  • Yakaolang (mai 2000 et janvier 2001) : Après avoir repris Yakaolang en mai 2000, Amnesty International a fait état de tueries systématiques de ceux qui étaient restés dans la ville, des centaines d’hommes ayant été emmenés et tués.6 Un massacre spécifique a eu lieu à Yakaolang en janvier 2001, durant quatre jours et ciblant principalement les Hazaras. Environ 300 hommes civils, y compris du personnel humanitaire, ont été détenus et tués.5
  • Col de Robatak (mai 2000) : 31 corps ont été découverts près du col de Robatak, dont 26 ont été identifiés comme des civils Hazaras chiites.5
  • Plaines de Shomaili (juillet 1999) : Une offensive talibane dans cette région a été marquée par des exécutions sommaires, l’enlèvement et la disparition de femmes, l’incendie de maisons, la destruction de biens et l’abattage d’arbres fruitiers.5 Le Secrétaire général des Nations Unies a rapporté que les forces talibanes « traitaient essentiellement la population civile avec hostilité et ne faisaient aucune distinction entre combattants et non-combattants ».5
  • Province de Faryab (juillet 1998 et décembre 1997) : Des rapports non confirmés ont fait état de l’exécution d’un grand nombre de civils par les Talibans lors de combats.4 Fin 1997, des forces talibanes en retraite auraient tué quelque 600 civils.4
  • Province de Zabol (novembre 1998) : Des rapports détaillent le meurtre de 300 civils, y compris des femmes et des enfants, par un sous-gouverneur taliban.4

 

C. Tendances plus larges des abus : Exécutions extrajudiciaires, disparitions et déplacements forcés

Au-delà des massacres de masse, les Talibans ont été responsables d’un large éventail d’autres violations des droits humains :

  • Exécutions extrajudiciaires : Les Talibans ont commis de nombreuses exécutions politiques et extrajudiciaires, y compris des tueries ciblées, des exécutions sommaires et des morts en détention. Des universitaires et du personnel d’agences des Nations Unies ont été parmi les victimes.4
  • Disparitions : Des allégations persistantes ont fait état de l’existence de prisons privées gérées par les Talibans et de leur responsabilité dans des disparitions, en particulier de Hazaras après la prise de Mazar-e-Sharif.4
  • Déplacements forcés : Des civils ont été forcés de se déplacer pendant les offensives, et des expulsions forcées de Hazaras et de Tadjiks ont été signalées dans les zones nouvellement occupées.4 Les Talibans ont également imposé des blocus sur des régions comme le Hazarajat, provoquant de graves souffrances pour la population.4
  • Torture et détention arbitraire : La torture était utilisée contre les opposants et les prisonniers de guerre, bien que son application ne soit pas toujours systématique. Les arrestations et détentions arbitraires étaient courantes, souvent basées sur l’origine ethnique ou la suspicion de sympathie avec les opposants.4
  • Exécutions publiques et châtiments : Les Talibans ont appliqué leur interprétation extrême de la loi islamique par le biais d’exécutions publiques pour divers crimes (adultère, meurtre), d’amputations pour vol et de passages à tabac pour « tenue indécente » ou longueur de barbe non conforme.4

La constance de ces massacres et abus à travers différentes localisations et périodes durant le premier régime taliban indique une politique délibérée et coordonnée, plutôt que des actes isolés de violence. Cette nature systématique des attaques contre des populations civiles, souvent basées sur leur appartenance ethnique ou leur loyauté perçue, correspond aux définitions des crimes contre l’humanité en droit international. L’absence d’enquêtes indépendantes et de responsabilité pour ces actions à cette époque a créé un climat d’impunité, jetant les bases pour la répétition de tels abus lors des périodes ultérieures de contrôle taliban.

D. Idéologie talibane et motivation du ciblage ethnique

Le ciblage des minorités par les Talibans est intrinsèquement lié à leur idéologie. Étant majoritairement pachtounes et sunnites, ils ont explicitement ciblé les Hazaras chiites par une rhétorique anti-chiite et anti-Hazara.1 Les Talibans ont utilisé l’Islam comme un « prétexte pour pratiquer l’épuration ethnique ».5 Au-delà des tueries, la destruction de sites culturels, tels que les statues bouddhistes de Bamiyan, s’inscrivait dans une perversion plus large des coutumes et de la culture afghanes, visant à effacer l’identité des groupes non-pachtounes et non-sunnites.5

Table 1: Principaux massacres ethniques et tueries ciblées par les Talibans (1998-2001)

 

Incident/Lieu

Date (Approx.)

Groupe(s) ethnique(s) principal(aux) ciblé(s)

Estimations des victimes

Nature de l’incident

Source

Mazar-e-Sharif

Août 1998

Hazaras, Tadjiks, Ouzbeks

2 000 – 5 000

Exécutions sommaires, recherches systématiques d’hommes et de garçons, tirs indiscriminés

4

Bamiyan

Septembre 1998

Civils (incl. Hazaras)

500 (dont 200 civils)

Exécutions sommaires après la prise de la ville

4

Village près de Bamiyan

Septembre 1998

Civils

45

Massacre par commandants talibans

4

Province de Zabol (Qalat-i-Ghilzai à Ghami)

Novembre 1998

Civils (incl. femmes et enfants)

300

Tueries par un sous-gouverneur taliban après vol

4

Plaines de Shomaili

Juillet 1999

Civils

Non spécifié

Exécutions sommaires, enlèvements, destruction de biens, politique de la terre brûlée

5

Yakaolang (Bamiyan)

Mai 2000

Civils (principalement Hazaras)

Centaines

Tueries systématiques des personnes restées en ville après la reprise

6

Col de Robatak

Mai 2000

Hazaras chiites

26 (identifiés comme civils)

Découverte de corps de civils massacrés

5

Yakaolang (Bamiyan)

Janvier 2001

Hazaras

300 (hommes civils)

Détention et exécution de civils sur quatre jours

5

 

III. La période d’insurrection (2001-2021) : Continuité des violations des droits humains

Après la chute de leur premier régime en 2001, les Talibans ont mené une insurrection prolongée contre le gouvernement afghan soutenu par la communauté internationale. Bien que cette période ait vu moins de massacres ethniques à grande échelle directement attribuables aux Talibans par rapport à leur premier règne, les violations des droits humains ont persisté et ont continué d’affecter les populations civiles, y compris les minorités.

A. Nature des violations pendant l’insurrection

Durant cette période, les Talibans ont continué à mener des attaques qui ont souvent eu des conséquences dévastatrices pour les civils. En 2008, par exemple, les Talibans ont mené un attentat suicide dévastateur contre l’ambassade de l’Inde à Kaboul, tuant plus de 50 personnes.9 Les rapports indiquent que les civils afghans ont été les principales victimes de la « mauvaise gouvernance » des Talibans et d’autres factions armées.5 La guerre a également entraîné des déplacements massifs de population, avec des millions d’Afghans cherchant refuge à l’intérieur du pays ou dans les pays voisins.9

À l’approche du retrait des troupes américaines et de l’OTAN en 2021, les Talibans ont intensifié leurs offensives, et les rapports ont fait état d’une augmentation significative des victimes civiles. Au cours du premier semestre 2021, les forces talibanes ont été responsables de la mort de 699 civils, selon la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (UNAMA), ou 917, selon la Commission indépendante des droits de l’homme en Afghanistan (AIHRC).14 Les Talibans ont également été tenus responsables de la « vaste majorité » des destructions et pillages de maisons privées et d’infrastructures civiles en mai et juin 2021.14

Des exécutions extrajudiciaires ciblées ont été signalées. En mai 2021, Sohail Pardis, un traducteur ayant travaillé pour les forces armées américaines, a été décapité par les Talibans après avoir été extrait de sa voiture.14 En juillet 2021, à Kandahar, les forces talibanes ont exécuté des critiques et des personnes soupçonnées d’être d’anciens membres des gouvernements provinciaux et leurs proches.14 Des commandants talibans ayant supervisé de telles atrocités sont également considérés comme responsables de crimes de guerre.14 Dans le district de Malestan, en juillet 2021, les forces talibanes ont tué des civils, pillé des propriétés privées, les ont incendiées et ont détruit des magasins. Neuf Hazaras ont été exécutés extrajudiciairement à Mundarakht, dans le district de Malestan, entre le 4 et le 6 juillet 2021, dont trois ont été torturés avant leur exécution.14

D’autres incidents notables incluent l’assassinat de Dawa Khan Menapal, chef du centre d’information et des médias gouvernementaux, en août 2021 à Kaboul, revendiqué par les Talibans.14 Le même jour, 30 soldats auraient été tués par les Talibans à Zaranj, certains d’entre eux ayant été torturés et énucléés.14 En août 2021, une vidéo montrait Haji Mullah Achakzai, l’ancien chef de la police de la province de Badghis, les yeux bandés et ligoté avant d’être abattu à bout portant par des combattants talibans.14 En septembre 2021, une ancienne policière enceinte, Banu Negar, a été assassinée à Firozkoh par des combattants talibans arabophones.14 Un rapport de Human Rights Watch de novembre 2021 a révélé que les Talibans avaient tué ou fait disparaître de force plus de 100 anciens membres des forces de sécurité afghanes dans seulement quatre provinces (Ghazni, Helmand, Kandahar et Kunduz) au cours des trois mois suivant la prise de pouvoir.14 Des accusations d’exécutions extrajudiciaires et de blocus alimentaires ont également été portées contre les Talibans lors du conflit du Panjshir.14

 

B. Impact sur les minorités ethniques et religieuses

Tout au long de cette période d’insurrection, les Hazaras ont continué de faire face à la persécution et à la discrimination.11 Bien que la nature des attaques ait pu évoluer, leur vulnérabilité est restée une constante. À partir de 2016, de nouvelles menaces sécuritaires ont émergé pour la communauté chiite Hazara avec l’établissement de l’IS-KP en Afghanistan, qui a commencé à cibler spécifiquement les Hazaras.3 Cette nouvelle dynamique a ajouté une couche de complexité à la situation sécuritaire des minorités, les plaçant souvent entre deux feux.

IV. Le second régime taliban (depuis août 2021) : La persistance du ciblage ethnique et l’émergence de nouvelles menaces

La reprise du contrôle de l’Afghanistan par les Talibans en août 2021 a marqué le début d’une nouvelle ère de violations des droits humains, avec une continuité notable dans le ciblage des minorités ethniques et religieuses, tout en introduisant de nouvelles dynamiques de menace.

A. Reprise du pouvoir et promesses non tenues

Après avoir pris le pouvoir en août 2021, les Talibans ont annulé la constitution et les lois précédentes.8 Initialement, ils ont fait des promesses publiques de « changement » et ont annoncé une « amnistie générale » pour les anciens responsables gouvernementaux et les membres des forces de sécurité.2 Cependant, les preuves sur le terrain contredisent ces affirmations, démontrant une persistance des abus.2 Le manque persistant d’enquêtes indépendantes et de responsabilisation pour les abus commis par les Talibans, malgré ces promesses, perpétue un climat d’impunité. Cette absence de justice pour les crimes passés et présents permet aux auteurs de continuer leurs actions sans crainte de conséquences, sapant toute crédibilité des Talibans en tant qu’autorité de facto respectueuse des droits.

B. Ciblage continu des Hazaras et autres minorités

La communauté Hazara reste une cible principale de persécution sous le second régime taliban.3 Les attaques systématiques visent leurs lieux de culte, leurs écoles, leurs centres sportifs et leurs transports publics à travers le pays.3 Des exemples frappants incluent les attaques contre des centres éducatifs comme la Mawoud Academy et la Kaaj Academy, cette dernière ayant causé la mort de 58 étudiants, principalement des filles.12

Au-delà des attaques directes, des milliers d’Hazaras ont été victimes de déplacements forcés, leurs terres étant souvent redistribuées aux alliés talibans.3 Des témoignages indiquent que les Talibans ont spécifiquement ciblé les Hazaras aux frontières terrestres, comme au poste de Boldak-Chaman, rendant leur évacuation du pays extrêmement difficile.2 De plus, des rapports suggèrent que les Hazaras sont marginalisés dans l’accès à l’aide humanitaire dans leurs propres régions.12

 

C. Le rôle croissant de l’État islamique du Khorasan (IS-KP)

Une évolution majeure du paysage des menaces depuis 2021 est le rôle croissant de l’IS-KP. Ce groupe extrémiste considère les musulmans chiites, dont les Hazaras, comme des apostats et, par conséquent, des cibles légitimes de meurtre.3 L’IS-KP a revendiqué de nombreux attentats à la bombe et attaques armées contre les Hazaras, causant des centaines de victimes ; en 2022 seulement, au moins 700 personnes ont été tuées ou blessées dans de telles attaques.7

La situation des Hazaras est donc complexifiée par l’émergence de l’IS-KP. Bien que l’IS-KP soit responsable de nombreuses attaques directes, la position des Talibans en tant qu’autorité de facto est également critique. Les Talibans ont échoué à fournir une protection adéquate aux communautés Hazaras, et leurs propres actes discriminatoires, ancrés dans une vision négative et méprisante des Hazaras, exacerbent leur vulnérabilité.3 Cette dynamique crée un environnement où les Hazaras sont pris en étau entre la violence directe de l’IS-KP et la discrimination institutionnelle et les abus occasionnels des Talibans.

D. Violences et discriminations systémiques plus larges

La violence ethnique est une composante d’un schéma plus large de violations des droits humains sous le second régime taliban :

  • Exécutions extrajudiciaires et disparitions forcées : Les Talibans ont mené des exécutions de vengeance et des disparitions forcées ciblant les anciens responsables gouvernementaux et les membres des forces de sécurité.7 L’UNAMA a documenté au moins 800 cas d’exécutions extrajudiciaires, d’arrestations arbitraires et de détentions, plus de 144 cas de torture et de traitements brutaux, 218 décès extrajudiciaires et 14 disparitions forcées d’anciens employés du gouvernement et du personnel de sécurité depuis août 2021.16
  • Torture et mauvais traitements : La torture est signalée comme étant systématique, en particulier par la Direction générale du renseignement (GDI) des Talibans, avec des méthodes incluant le simulacre de noyade.15
  • Répression des femmes et des filles : Les Talibans ont imposé un « apartheid de genre », avec des restrictions draconiennes sur la liberté de mouvement, le travail, l’éducation au-delà du primaire, et la participation publique des femmes et des filles.7 Des augmentations significatives de la violence basée sur le genre, y compris des viols et des mariages forcés, ont été rapportées.8
  • Répression de la liberté d’expression et des médias : Les Talibans ont exercé une censure étendue et une violence contre les médias afghans, entraînant la fermeture de centaines de médias et le licenciement de journalistes.7
  • Déplacements forcés et crise humanitaire : Des milliers d’Afghans ont été déplacés, et plus de 90 % de la population souffre d’insécurité alimentaire.7

Cette violence ethnique s’inscrit dans un schéma plus large de violations des droits humains. La persécution de genre, la suppression de la dissidence et la crise économique ne sont pas des phénomènes isolés, mais des facettes d’un système de répression et de contrôle étendu mis en œuvre par les Talibans, affectant diverses populations vulnérables et tous les aspects de la vie quotidienne.

Table 2: Violences ciblées documentées contre les minorités (août 2021-Présent)

 

Incident/Lieu

Période

Groupe(s) ciblé(s)

Nature de la violence

Acteur(s) responsable(s) principal(aux)

Source

Kandahar

Juillet 2021

Critiques du régime, anciens membres du gouvernement

Exécutions extrajudiciaires

Talibans

14

Malestan District

Juillet 2021

Hazaras

Exécutions extrajudiciaires (9 Hazaras, 3 torturés), pillages, incendies

Talibans

14

Spin Boldak

Juillet 2021

Civils

Détentions arbitraires (380-900), exécutions arbitraires (40-100)

Talibans

14

Firozkoh

Septembre 2021

Ancienne policière enceinte (Banu Negar)

Meurtre par balle après passage à tabac

Combattants talibans arabophones

14

Provinces de Ghazni, Helmand, Kandahar, Kunduz

Août-Novembre 2021

Anciens membres des forces de sécurité afghanes

Plus de 100 tués ou disparus de force

Talibans

14

Panjshir

2021

Civils

Exécutions extrajudiciaires, blocus alimentaires

Talibans

14

Diverses provinces

2022

Hazaras

Bombardements et attaques armées (700 victimes en 2022)

IS-KP (principalement)

7

Balkhab (Sar-e Pul)

Juin 2022

Civils Hazaras

Exécutions sommaires après la mort de Mawlawi Mehdi

Talibans

3

Kabul, Kunduz, Mazar-e-Sharif

2022-2024

Hazaras (lieux de culte, écoles)

Attaques systématiques, attentats-suicides

IS-KP (principalement)

3

Afghanistan (général)

Août 2021 – Août 2023

Anciens responsables gouvernementaux et forces de sécurité

218 exécutions extrajudiciaires, 14 disparitions forcées, 144 cas de torture/mauvais traitements

Talibans

16

Afghanistan (général)

Août 2021 – Mars 2024

Femmes et filles

1033 cas d’usage illégal de la force par le MPVPV, arrestations, détentions, violences basées sur le genre (332 tueries jan 2022-juin 2024)

Talibans (MPVPV)

8

Frontières terrestres (Boldak-Chaman)

Août 2021

Hazaras

Ciblage spécifique, entrave à l’évacuation

Talibans

2

 

V. Conclusions

L’examen des données disponibles depuis 1998 révèle que les massacres ethniques et les violences ciblées commis par les Talibans en Afghanistan ne sont pas des incidents isolés, mais des manifestations d’une politique systématique, profondément enracinée dans une idéologie ethno-religieuse. Le massacre de Mazar-e-Sharif en 1998 a marqué un point culminant de cette violence, ciblant principalement les Hazaras en raison de leur appartenance ethnique et de leur confession chiite, perçues comme une menace ou une trahison par les Talibans majoritairement pachtounes et sunnites. La justification de ces atrocités par un récit de « vengeance » a servi de prétexte pour des campagnes d’épuration ethnique plus larges.

La période d’insurrection (2001-2021) a vu une continuité des violations des droits humains par les Talibans, avec des attaques contre les civils et des exécutions ciblées, même si les massacres de masse à caractère explicitement ethnique ont été moins documentés. Cependant, la reprise du pouvoir par les Talibans en août 2021 a entraîné une recrudescence des abus, malgré les promesses de modération. Les Hazaras continuent d’être une cible privilégiée, confrontés à des attaques systématiques contre leurs communautés et leurs institutions.

La situation actuelle est d’autant plus complexe que l’État islamique du Khorasan (IS-KP) a émergé comme un acteur majeur, menant de nombreuses attaques meurtrières contre les Hazaras. Les Talibans, en tant qu’autorité de facto, n’ont pas réussi à protéger cette minorité vulnérable, et leurs propres politiques discriminatoires exacerbent la précarité des Hazaras.

Enfin, le manque persistant d’enquêtes indépendantes et de responsabilité pour ces crimes, tant sous le premier que le second régime taliban, a créé un cycle d’impunité. Cette absence de justice permet aux auteurs de continuer leurs actions sans crainte de conséquences, sapant toute crédibilité des Talibans en tant qu’autorité de facto respectueuse des droits. La violence ethnique est une facette d’un régime répressif plus large, caractérisé par des violations généralisées des droits humains, notamment contre les femmes et les libertés fondamentales, soulignant une approche systémique de contrôle et de répression.

 

 

Sources des citations

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  18. Afghanistan , June 2025 Monthly Forecast – Security Council Report, consulté le juillet 14, 2025, https://www.securitycouncilreport.org/monthly-forecast/2025-06/afghanistan-29.php
  19. One year under the Taliban: Stories of survival in Afghanistan | @AJLabs @AJEnglish, consulté le juillet 14, 2025, https://interactive.aljazeera.com/aje/2022/afghanistan-people-behind-the-numbers
Zones Hazara affectées par les violences talibanes

Zones Hazara et Massacres Ciblés par les Talibans

Cette visualisation met en évidence les principales régions à prédominance Hazara et les incidents majeurs de violence ethnique documentés depuis 1998.

Hazarajat Central

Cœur historique de la patrie Hazara, cette région montagneuse a été la cible d’offensives brutales des Talibans, visant à les déloger et à affirmer leur domination.

Septembre 1998 & Septembre 1999
Bamiyan : Après la prise de la ville, des centaines de civils Hazaras ont été massacrés. Les destructions culturelles comme les Bouddhas de Bamiyan symbolisent également l’oppression exercée par les Talibans contre l’héritage Hazara et chiite.
Janvier 2001
Yakaolang (province de Bamiyan) : Des centaines de civils masculins Hazaras ont été systématiquement exécutés par les Talibans lors de plusieurs vagues d’offensives.
Mai 2000
Col de Robatak (frontière entre Baghlan et Samangan) : 26 civils Hazaras ont été retrouvés massacrés, témoignant des violences lors des déplacements et des combats dans la région.
2021 (principalement juillet-août)
Malistan et Jaghori (province de Ghazni) : Offensives talibanes brutales avant la prise de Kaboul, caractérisées par des exécutions, des pillages, des destructions de maisons et des déplacements forcés de milliers de Hazaras.
Nord de l’Afghanistan (Provinces de Balkh, Faryab, Samangan)

Ces provinces ont vu des violences généralisées lors des campagnes talibanes pour consolider leur contrôle sur le nord, ciblant non seulement les Hazaras mais aussi les Tadjiks et les Ouzbeks.

Août 1998
Mazar-e-Sharif (province de Balkh) : Massacres de grande ampleur contre les Hazaras, mais aussi les Tadjiks et les Ouzbeks. Des milliers de civils ont été tués lors de l’entrée des Talibans dans la ville, souvent par exécution sommaire ou asphyxie dans des conteneurs.
Région de Kaboul

Malgré la diversité ethnique de la capitale, le district de Dasht-e-Barchi, à forte majorité Hazara, est devenu une cible fréquente pour les attaques terroristes et les discriminations.

Depuis Août 2021
Dasht-e-Barchi (Kaboul) : Ce quartier densément peuplé de Hazaras chiites a été la cible de nombreux attentats terroristes (souvent attribués à l’IS-KP), notamment contre des écoles et des hôpitaux. Bien que la plupart soient perpétrés par l’IS-KP, les Talibans sont critiqués pour leur échec à protéger cette communauté et pour leurs propres politiques discriminatoires.
Sud et Est de l’Afghanistan (Provinces de Zabol, Ghazni)

Ces régions, bien que ne constituant pas le cœur du Hazarajat, ont également été le théâtre d’atrocités ciblées contre des Hazaras lors des campagnes talibanes.

Novembre 1998
Province de Zabol (secteur de Qalati Ghilzai à Ghami) : Environ 300 civils, y compris des femmes et des enfants, auraient été massacrés par les forces talibanes dans le cadre de leurs opérations.

Note Importante :

Depuis le retour au pouvoir des Talibans en 2021, la nature des violences a évolué. Bien que des massacres à grande échelle directement attribués aux Talibans soient moins fréquents que dans la période 1998-2001, les Hazaras continuent de faire face à des exécutions extrajudiciaires, des arrestations arbitraires, des déplacements forcés et une discrimination systémique. De plus, des groupes comme l’État Islamique du Khorasan (IS-KP) ciblent également massivement la communauté Hazara, souvent avec des centaines de victimes, dans un contexte où les Talibans ne parviennent pas à assurer leur sécurité.



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