La photo d’identité des femmes : symbole de dignité humaine et droit fondamental de citoyenneté
Les Talibans franchissent une nouvelle étape dans l’effacement des femmes afghanes : la photo sur les cartes d’identité devient facultative.
Derrière ce « choix », une stratégie claire : rendre les femmes invisibles, les priver d’existence légale et d’accès aux droits les plus élémentaires.
Depuis 2021, plus de 100 décrets restreignent déjà l’éducation, l’emploi, la mobilité et la visibilité publique des Afghanes.
C’est un apartheid de genre assumé. La communauté internationale doit cesser de fermer les yeux.
Par Fakhria Samandari
Gawharshad Begum Online School
Le droit à l’identité est l’un des droits humains fondamentaux, souligné dans les instruments nationaux et internationaux. La carte nationale d’identité, le passeport et les autres documents officiels ne sont pas seulement des outils d’identification dans la société : ils constituent aussi un pont entre l’individu et l’État. Parmi ces éléments, la photo du titulaire est l’élément central de reconnaissance et de preuve de l’identité. Supprimer la photo des femmes sur les documents officiels n’est pas seulement contraire aux principes des droits humains et à la Constitution afghane, mais entraîne aussi de graves conséquences juridiques, sociales et culturelles.
La place de la photo dans les documents d’identité
La photo est un élément indissociable de l’identification officielle d’une personne. L’article 55 de la loi sur l’état civil en Afghanistan rend obligatoire la présence d’une photo sur la carte d’identité pour garantir sa validité et son caractère officiel. Sans photo, le document est considéré comme incomplet et dépourvu de valeur légale. Ainsi, l’absence de photo de femmes ne crée pas seulement des difficultés administratives, elle les prive de toute reconnaissance officielle.
Conséquences juridiques et sociales de la suppression de la photo des femmes
- Violation de la Constitution afghane : l’article 22 interdit toute discrimination entre citoyens, hommes et femmes. Supprimer la photo des femmes constitue une violation flagrante de cet article.
- Restriction des droits civils et politiques : selon l’article 36 de la Constitution, les citoyens ont le droit de circuler librement. Sans photo d’identité, les femmes se voient privées du droit de voyager, d’étudier, de travailler et de participer à la vie sociale.
- Aggravation des discriminations de genre : cette mesure réduit les femmes à un statut de citoyennes de seconde zone et élargit le fossé entre les sexes.
- Conséquences psychologiques et culturelles : effacer le visage des femmes dans les documents officiels revient à nier leur personnalité, leur dignité et leur confiance en elles.
Dimension religieuse et culturelle
Dans la vision islamique, hommes et femmes sont égaux en dignité humaine. Le Coran (Sourate Al-Hujurât, verset 13) affirme : « Ô hommes ! Nous vous avons créés d’un homme et d’une femme et Nous avons fait de vous des nations et des tribus, afin que vous vous connaissiez. » La reconnaissance mutuelle implique nécessairement une identité visible. L’histoire de l’islam témoigne aussi de la présence active des femmes dans la vie politique, économique et sociale, ce qui aurait été impossible sans une identité propre reconnue.
Dimension du droit international
La suppression de la photo des femmes dans les documents d’identité viole clairement les engagements internationaux de l’Afghanistan :
- Déclaration universelle des droits de l’homme, article 6 : « Chacun a le droit à la reconnaissance de sa personnalité juridique partout. »
- Pacte international relatif aux droits civils et politiques, article 16 : « Tout être humain a droit, partout, à la reconnaissance de sa personnalité juridique. »
- Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW), article 15 : égalité entre hommes et femmes devant la loi.
Conclusion
La photo sur un document d’identité n’est pas une simple image, mais le symbole de la présence, de la dignité et de la personnalité de la femme dans la société. La supprimer revient à nier l’identité des femmes, à violer la Constitution afghane, à bafouer les engagements internationaux et à institutionnaliser la discrimination de genre. Une société qui rend ses femmes invisibles nie en réalité la moitié de son corps social et se prive de justice, de développement et de progrès. Préserver la photo des femmes dans les documents d’identité, c’est défendre les droits humains, protéger l’égalité de genre et respecter la dignité humaine.
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