Afghanistan 2025 : un réalignement régional sous tension

GÉOPOLITIQUE 2025

AFGHANISTAN : LE GRAND RÉALIGNEMENT

Comment la fragilité interne des Taliban redessine l’équilibre Inde–Pakistan–Chine

LE CŒUR DU BASCULEMENT

🇦🇫 LES TALIBAN : POUVOIR FRAGILISÉ & INQUIET

📉 DYNAMIQUE INTERNE
  • Kandahar (Forteresse) : Recentrage du pouvoir autour d’Haibatullah.
  • Kaboul (Affaibli) : Perte d’influence du clan Haqqani.
  • Mouvement militaire : Transfert massif d’armes vers le Sud (peur de la sédition).
⚠️ ISOLEMENT CROISSANT
  • ➜ Perte de confiance de la Russie et de la Chine.
  • ➜ Incapacité à gérer le terrorisme (EI-K, Ouïghours).
  • ➜ Recherche désespérée de nouveaux alliés.

🇵🇰 PAKISTAN

Le grand perdant


  • Fin de la « Profondeur Stratégique » (Doctrine de 40 ans brisée).
  • Menace existentielle : Encerclement par une alliance Inde-Taliban.
  • Ligne Rouge : Soutien des Taliban au TTP.

🇮🇳 INDE

L’opportuniste inédit


  • Stratégie : « Les ennemis de mes ennemis sont mes amis ».
  • Le Deal : Aide humanitaire/économique contre accès minier.
  • Objectif : Remplacer le vide laissé par la Chine et le Pakistan.

🇨🇳 CHINE

Le géant inquiet


  • Doute : Colère suite aux attentats contre ses ingénieurs.
  • Crainte majeure : Un Afghanistan pro-Inde qui menacerait les routes de la soie (CPEC).
  • Réaction : Prise de distance diplomatique.
📌 LA CONCLUSION 2025

L’Afghanistan redevient la matrice d’un nouvel affrontement régional. Isolé et fragilisé, le régime Taliban joue sa survie en pivotant vers l’Inde, créant le scénario le plus redouté par Islamabad et pékin.

Comprendre comment les dynamiques internes aux Taliban redessinent l’équilibre Inde–Pakistan–Chine

L’année 2025 marque un tournant géopolitique majeur en Asie du Sud. Alors que le régime taliban semblait solidement installé à Kaboul, des signaux récents montrent une fragilisation rapide du mouvement, une perte de confiance régionale et une recomposition de ses alliances. Nos sources internes, qui confirment des mouvements militaires inhabituels, permettent de lire ces événements non comme des incidents isolés, mais comme un basculement stratégique majeur.

À mesure que les Taliban transfèrent leurs stocks d’armement vers Kandahar et resserrent leur pouvoir autour d’Haibatullah, un nouvel axe régional se forme. L’Inde saisit l’occasion pour accroître son influence. Le Pakistan s’inquiète de perdre la profondeur stratégique qui faisait partie de sa doctrine militaire depuis 40 ans. La Chine doute de plus en plus du régime taliban. L’Afghanistan redevient, comme souvent dans son histoire, le cœur brûlant d’une rivalité à plusieurs niveaux.

1. Les Taliban : un pouvoir fragilisé, recentré et inquiet

Perte de confiance régionale et isolement diplomatique

Les Taliban apparaissaient jusqu’ici comme un bloc monolithique. Mais plusieurs signaux récents montrent une nervosité inhabituelle. La Russie — pourtant la seule puissance à avoir officiellement reconnu le régime — exprime désormais sa profonde inquiétude face à la présence de groupes terroristes en Afghanistan

Moscou se dit préoccupé par l’expansion de l’EI-K, par l’arrivée de combattants étrangers et par la possibilité que des armes occidentales récupérées en 2021 circulent dans la région.

La Chine, elle aussi, laisse filtrer son irritation : des sources évoquent la présence persistante de combattants ouïghours dans le Nord-Est afghan et l’assassinat de cinq ingénieurs chinois près de la frontière tadjike. Pékin doute désormais de la capacité ou de la volonté des Taliban à neutraliser ces groupes.

Cette perte de confiance simultanée de Moscou et Pékin isole dangereusement le régime.

Recentrage du pouvoir : Kandahar comme forteresse

Nos sources internes le confirment : les Taliban ont ramené des stocks d’armement, des munitions et du matériel sensible vers Kandahar, Helmand, Nimroz et Uruzgan. Des cargaisons provenant des dépôts centraux de Kaboul ont été déplacées vers des zones rurales ultra-loyales, notamment Sangin en Helmand

.

Pour la première fois depuis 2021, les Taliban montrent une véritable inquiétude :

  • peur que leurs armes tombent aux mains d’opposants internes, notamment le clan Haqqani,
  • volonté de sanctuariser le Sud, berceau historique du mouvement,
  • réduction de l’autorité de Siraj Haqqani au profit d’un pouvoir toujours plus concentré à Kandahar.

Cette dynamique laisse entrevoir une lutte interne silencieuse. Haqqani, longtemps indispensable au régime pour contrôler Kaboul et le secteur sécuritaire, voit son influence diminuer. Le leadership d’Haibatullah se replie sur les tribus du Sud, dans une logique de survie politique.

Une diplomatie contrainte, tournée vers de nouveaux partenaires

Face à cette fragilité, les Taliban cherchent des soutiens alternatifs. Mais la plupart des États voisins se méfient ou s’éloignent. L’Iran, entre rivalité historique et pragmatisme régional, se propose ponctuellement comme médiateur entre les Taliban et le Pakistan — notamment sur la question du TTP — afin d’éviter une escalade frontalière qui toucherait directement son territoire.

Mais la rupture la plus visible est ailleurs : Kaboul se tourne de plus en plus vers New Delhi, ce qui bouleverse tout l’équilibre stratégique de l’Asie du Sud.

2. Inde : un rapprochement stratégique inédit avec les Taliban

Pourquoi l’Inde s’engage auprès des Taliban ?

Les visites successives du ministre des Affaires étrangères taliban puis du ministre du Commerce à New Delhi illustrent une accélération du rapprochement entre les deux régimes. Comme le rapporte l’article de RFI, l’Inde accepte d’envisager un partenariat économique avec les Taliban — fourniture de médicaments, outils industriels, sucre, thé — en échange d’un accès aux ressources minières afghanes

.

Pour New Delhi, trois objectifs stratégiques convergent :

  • Réduire l’influence pakistanaise en Afghanistan.
  • Limite la pénétration chinoise dans la région.
  • Créer un corridor alternatif vers l’Asie centrale via l’Iran et l’Afghanistan.

Cette stratégie s’appuie sur l’adage cité dans le document :
« Les ennemis de mes ennemis sont mes amis. »

Les Taliban comme levier contre Islamabad
L’Inde perçoit aujourd’hui les Taliban de façon moins idéologique et davantage pragmatique : un acteur utile pour affaiblir la profondeur stratégique pakistanaise.

En effet :

  • Les Taliban ont rompu leurs liens commerciaux avec le Pakistan.
  • Ils refusent d’expulser les combattants du TTP.
  • Ils cherchent des financements alternatifs face à l’épuisement international.

Tout cela crée une convergence d’intérêts objective :
l’Inde peut offrir ce que le Pakistan ne peut plus apporter, tandis que les Taliban peuvent fragiliser un rival historique de New Delhi.

Les limites du rapprochement

L’Inde reste prudente : elle ne reconnaît pas officiellement les Taliban. Elle avance par “contacts techniques” pour limiter les critiques internationales. Mais la tendance est claire : New Delhi occupe progressivement l’espace laissé vide par la Chine et la Russie.

3. Pakistan : une menace stratégique sans précédent

La plus grande inquiétude d’Islamabad depuis 40 ans

Pour le Pakistan, l’Afghanistan a toujours représenté plus qu’un voisin : une profondeur stratégique vitale en cas de conflit majeur avec l’Inde. Depuis les années 1980, Islamabad considérait le contrôle ou l’influence sur Kaboul comme un pilier de sa sécurité nationale.

Or, pour la première fois, ce schéma se renverse.

Le Pakistan perçoit le rapprochement Inde–Taliban comme :

  • une menace existentielle,
  • un encerclement stratégique,
  • un risque de guerre hybride sur deux fronts : Cachemire et frontière afghane.

Le rôle du TTP : la ligne rouge

Selon nos précédents rapports sur le terrorisme, le TTP compte environ 6 000 combattants en Afghanistan et bénéficie d’un soutien logistique continu des Taliban afghans

Islamabad est catégorique : si Kaboul ne neutralise pas le TTP, le Pakistan se réserve le droit de mener des frappes transfrontalières. Le général Asim Munir a explicitement demandé aux Taliban de choisir entre le Pakistan et les « kharijites du TTP ».

Jusqu’ici, les Taliban n’ont rien entrepris. Cette posture est interprétée au Pakistan comme :

  • un signal d’hostilité,
  • un alignement tacite sur l’Inde,
  • une remise en cause de l’équilibre historique entre ISI (services secrets pakistanais) et réseaux talibans.

Vers une rupture stratégique ?

Les tensions actuelles (frappes aériennes, fermetures de frontières, expulsions de réfugiés afghans) montrent que la relation est entrée dans une phase de confrontation froide.

Si les Taliban basculent définitivement vers l’Inde :

  • Islamabad perd son influence historique en Afghanistan.
  • Le Pakistan doit gérer une insurrection intérieure (TTP) encouragée par la passivité de Kaboul.
  • Le pays fait face à un encerclement Inde à l’Est / Afghanistan pro-Inde à l’Ouest.

Pour un État dont l’architecture sécuritaire est centrée sur la rivalité avec l’Inde, ce scénario est catastrophique.

4. Chine : inquiétude, pragmatisme et recherche de stabilité

Pékin face à un Afghanistan instable

La Chine a longtemps adopté une politique prudente mais constructive envers Kaboul :

  • investissements miniers (Aynak),
  • projets énergétiques,
  • discussions autour d’un mini-corridor reliant l’Afghanistan au CPEC.

Mais l’assassinat de cinq ingénieurs chinois, les doutes autour des groupes ouïghours et l’incapacité des Taliban à sécuriser le territoire ont fait basculer l’attitude de Pékin.

Le risque d’un Afghanistan pro-Inde

Pour la Chine, l’évolution la plus dangereuse n’est pas l’EI-K mais la possibilité d’un rapprochement durable entre Taliban et Inde.

Ce scénario :

  • menace le CPEC,
  • affaiblit le Pakistan, principal allié stratégique de Pékin,
  • installe l’Inde à proximité des routes commerciales chinoises vers l’Asie centrale.

Conclusion : un Afghanistan au centre d’un basculement géopolitique

Les dynamiques internes aux Taliban — recentrage sur Kandahar, tensions avec les Haqqanis, transferts d’armes, perte de confiance des grandes puissances — révèlent un régime fragilisé. Incapable de rassurer ses voisins, contesté de l’intérieur et isolé diplomatiquement, il cherche de nouveaux appuis.

L’Inde saisit cette opportunité. Le Pakistan la redoute. La Chine s’inquiète d’un renversement stratégique majeur. La Russie réévalue ses alliances.
L’Afghanistan redevient ce qu’il a toujours été dans l’histoire contemporaine : la matrice d’un nouvel affrontement régional, où chaque acteur projette ses intérêts dans un pays qui peine à maintenir sa propre cohésion.

À l’heure où les Taliban voient leur pouvoir se fragiliser, la recomposition des alliances autour de Kaboul pourrait devenir l’un des points géopolitiques les plus explosifs de la prochaine décennie.

Sources du dossier

AFIntl – Afghanistan International
https://www.afintl.com

RASC News / Rusk News Agency

صفحه نخست

RFI – Radio France Internationale
https://www.rfi.fr

Kokcha Press
https://kokchapress.com

Eurasia Review
(Mention secondaire dans l’analyse russe)

ONU – Conseil de sécurité
(Rapport sur le TTP et les menaces régionales)

Modern Diplomacy & Associated Press
(Citations ponctuelles dans les analyses)

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